Faites comme chez vous

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c'est recevant !

samedi 30 mai 2009

Dissonances - Lise Blouin

Le prologue plein de promesses donne le goût de rencontrer Florence, présentée comme une battante sur la 4ième de couverture. L’histoire commence par sa naissance, et Florence grandit en même temps que les pages tournent. Dès les premiers chapitres, j’ai éprouvé de la difficulté à m’habituer à la narration à la troisième personne me donnant la nette impression de lire une biographie.

L’on comprends rapidement que Florence aura l'occasion de démontrer sa force de caractère, le destin s’acharne sur elle, disons que la guigne s’est arrêtée juste au-dessus de sa tête. Elle réagit par un réflexe peu commun ; aider les femmes démunies allant jusqu’à les héberger malgré que son fils en soit malheureux. Lui aussi est un homme fort puisque malgré toutes les contrariétés de la vie, à commencer par celles que sa mère lui fait subir, il deviendra tout de même un homme équilibré. Un aidant. Comme sa mère. Ça tombe bien puisque Éliane surgit dans leur vie. Cette flamboyante musicienne de jazz agit et réagit comme une vedette. Elle donne naissance à une fille, Camélie qu’elle entrevoit dès sa naissance comme une entrave à sa carrière. Et voilà la table mise pour nos deux aidants, mère et fils, qui ne manqueront pas de fil à retordre.

Des thèmes abordés, il y a la dyslexie, l’itinérance aussi, ce sera la musique qui prendra le dessus à travers Éliane, cette virtuose qui personnifie la femme artiste faisant passer son art avant la maternité. Est-ce parce que la femme de carrière qui passe pour une égoïste est une problématique dont on a beaucoup entendue parler mais je ne me suis pas sentie interpeler. Mal m’en pris, c’est le pilier du roman. Toutes les actions tournent autour de l’aide à apporter à plus mal pris que soi. Que ce soit du fils à la mère, de la conjointe Mireille au fils mais essentiellement de Florence à Éliane et sa fille, Camélie. Cette dernière monopolisera toutes les énergies des donneurs dans son champ environnant.

La trame de ce roman ciblant l’émotion de la désespérance à différents degrés est servie essentiellement par un style à la troisième personne. Je dois dire que la détresse, non abordée directement, me rejoint moins : « Raconte-moi comment tu as pu survivre à son décès. As-tu été aussi détruite qu’aujourd’hui ? Me rejoues-tu une scène semblable ? Je t’ai piquée, là. J’ai surpris un plissement de tes yeux, un serrement au coin de tes lèvres. Ça y est, tu retires ta main, tu repousses définitivement ton plat ... »

Certains chapitres donnent la parole au fils Samuel, ceux-ci sont au « je », et même chose pour Camélie sous forme d’extraits de lettres d’une dyslexique. Il est évident que Lise Blouin est une auteure au verbe facile, inspiré, et qu’elle a du souffle. Les lettres de Camélie et leur épice absurde dégageaient une poésie que j’ai appréciée.

Évidemment cette distance donnée par le style est une option défendable mais personnellement cela a joué contre mon attachement aux personnages. À tous les personnages. Leurs nombreux malheurs ne m’ont pas atteint, même pas un frisson sur le cœur. Sans jeu de mots, c’est bien malheureux. Si encore j’avais lu et vu une sincère interrogation de la part de Florence face à cette question soulevée au 4ième de couverture : « se dépenser sans compter pour les autres au risque d’y perdre son propre bonheur » est-ce la voie à emprunter ? Cela aurait suscité une tension qui, à mon avis, manque cruellement à cette histoire. Les réponses arrivent toutes cuites dans le bec du lecteur, c'en est presque de l'ordre du réflexe, Florence choisit d'aider son prochain.

Après des études en pédagogie et en lettres à l'Université de Sherbrooke, Lise Blouin, née en Estrie, enseigne et publie plusieurs ouvrages pédagogiques. Son travail d'écriture la conduit vers le roman, genre qu'elle privilégie et auquel elle se consacre maintenant à temps plein.

Dans un article du Voir signé Dominic Tardif, l'auteure nous entretient de Dissonances - XYZ éditeur. Collection Romanichels 2009. 272 p.

mercredi 27 mai 2009

Ils ont le punch !

Vite, vite je vole au temps une dizaine de minutes ... euh, je vais essayer de me limiter à dix minutes. Dites-le moi, si je dépasse ! C’est que le temps me glisse des doigts, les notes du clavier aussi, et je cours après l’aiguille des secondes. Bon, d’accord, j’exagère et ça gobe du temps d'exagérer, surtout quand une seconde plus tard on s’en confesse ! Direct. Allez, j'y vais directement, je suis capable : Go !

J’avoue en partant que j’ai pris mon inspiration sur Facebook. Oui, oui ... c’est surprenant parfois. En tout cas, voici quelques jours j’ai été surprise de la réaction à une affirmation. Ce n'est pas suite à une de mes affirmations, et j'ai averti la personne que je la lui piquerai (il s’en lance plein à la face du book). Elle faisait allusion à son exaspération devant les préfaces de romans classiques qui dévoilent les punchs* (c’est un anglicisme, l’équivalent est point de chute !). Je ne sais pas s’il avait prévu autant de réactions, mais les commentaires se sont enlignés. Bien sûr, je m’en suis mêlé.

Et je suis rapidement sorti de la préface pour aborder la 4ième de couverture, et ensuite les critiques de lecture. Pour vous donner une idée jusqu’à quel point j’aime garder toute la surprise à l’histoire, j’hésite à lire le quatrième de couverture. C’est grave hein ? Je sais, c’est légèrement excessif ! À ma défense, je suis une lectrice avec une imagination débordante qui bondit en avant des actions, transpose, transfère et travestit l’action des personnages. Je tiens donc à mes fausses pistes. C’est mon univers de lectrice. Vous imaginez combien je me fais déjouer, puisqu’en partant des mêmes personnages, chaque personne se fabrique une histoire différente. On part des mêmes ingrédients et on ne fait pas la même sauce à spaghetti, imaginez une vie ! On part avec soi comme personnage et on s’amène où ? À son lit de mort. Mais vous avouerez que le comment on s’y rend est de première importance !!!

Donc, je me protège de toute divulgation d’intrigue, je veux dire, pas seulement du grand dénouement final qui assez souvent me déçoit. On est rarement entièrement satisfait d’une fin, vous ne trouvez pas ? J’imagine qu’il va en être de même pour notre propre fin. Que l’on ne décide pas. On se plaît à croire qu’on ne la décide pas, mais ne sommes-nous pas présentement à la préparer ? ... Mais ceci est une autre histoire. La vôtre. La mienne. La nôtre ... que je mets de côté (mais si ça vous chante de deviser sur ce thème, il y a pas de gêne !) pour revenir à un principal sujet, le lecteur, devant l’intrigue d’une histoire. Certaines personnes dans Facebook (des personnes plongées tête première dans le milieu littéraire) ne sont pas le moindrement dérangées par le fait de connaître des clés d’intrigue, qu'elles soient dévoilées par une préface ou par un critique. C’est entièrement le comment l'histoire se raconte qui les intéresse.

Il faut de tous les lecteurs pour faire de la lecture, ce n’est pas la première fois qu’on se le dit, mais vous qui n’avez pas participer à cette discussion, comment le vivez-vous ?

Ça m’intéresse de vous connaître sous cet angle. Remarquez, que ça changera pas ma manière de rédiger mes commentaires, je me battrai toujours contre mes mots, donnerais dans la censure bien sûr, pour ne rien dévoiler de l’intrigue, ça complexifie la tâche c’est certain, mais je le fais avec cœur. Comment faire autrement ? Ma mère avait pour son dire « on ne fait pas aux autres ce qu’on n’aimerait pas qu’on nous fasse ! ». Obéissante petite, obéissante toujours (pas vrai pantoute, c'est pour le besoin de la cause !).

Maintenant, à vous la parole, chers ami-es ... Je me tais, j’ai dépassé mon 10 minutes. Bip.

* (Petit Robert) Définition de punch : Aptitude d'un boxeur à porter des coups secs et décisifs . "Ils ont le punch : l'utilisation correcte des muscles frappeurs, et la détente".

Il me semble que les auteurs sont parfois des boxeurs, non ? En tout cas, j’aime bien quand ils aient du punch, et même qu’ils nous laissent KO.

lundi 25 mai 2009

Figurante d'ambiance

Voici ma journée, je vous l’offre sur un plateau ... de tournage. À ceux à qui ça tente. Aujourd’hui, et jeudi j’y retourne, j’étais à Montréal dans un lieu de prière sur St-Denis converti, le temps d’un tournage, en quartier général. Cette fois, l’administration (portables, cellulaires, paperasse), coin coiffure/maquillage, les comédiens et les figurants d’ambiance (le nom officiel !) dans la même pièce. Disons que les sept figurants que nous étions avions intérêt à nous faire discrets. Les conditions varient d’une figuration à l’autre. Comme pour un voyage, l’on part avec sa valise sans connaître le , le comment et le avec qui. Plutôt une aventure, puisqu’en plus, on ne connaît pas l’heure exacte à laquelle prend fin le voyage.

Avant de plonger dans cette journée, voici ce sommaire :
Télésérie québécoise « Ni plus ni moi » jouera à Série Plus, six épisodes d’une heure.
Comédiens principaux aujourd’hui : Emmanuel Bilodeau, Edith Cochrane
Lieu du tournage, tout à côté du quartier général (parfois l’on doit se déplacer en minibus) : Snack-Bar d’un quartier ouvrier. Figurants : clients du snack-bar accentuant l’ambiance de pauvreté de la classe ouvrière.

À l’arrivée, aussitôt le bonjour et le formulaire rempli, je me dirige vers la costumière et ensemble on fouille la valise. La demande que l’on m’avait faite au téléphone la veille: trois ensembles de vêtements, couleurs ternes avec de l’usure. Seulement deux de mes ensembles ont été approuvés, s’y trouvait un vert trop éclatant (voyez un vert sapin !).

Après, l’attente. Essayer de lire malgré le fort bruit ambiant, c’est très exigeant, ce qui fait qu’on se retrouve souvent à bavarder. De toutes manières, j’étais en compagnie de deux danseurs professionnels et leur conversation était passionnante. De temps en temps, la troisième assistante arrive dans le local, nous pointe du doigt « toi, viens ! ». La première fois, je n’ai pas eu le temps de mettre le pied dans le casse-croute, on m’a congédiée. Ils conversent à travers leurs oreillettes et micros et en résultent de nombreux changements. Et le cafouillis propre à la méthode du fur et à mesure. La deuxième fois, j’ai réussi à mettre le pied mais quelques minutes seulement puisque, après discussion de vive-voix et devant moi, on préfère me garder pour personnifier la femme du couple qui entre à la dernière scène.

Remarquez, le paragraphe ci-dessus équivaut à 4-5 heures d’attente. Si vous y rajoutez le dîner où les figurants apportent leur lunch ou vont manger au resto (un vrai !) sans encore avoir été utile, ça impressionne. Mais vers 16 h 00, cette fois semble la bonne, par contre on hésite sur le choix de mon partenaire. Quatre hommes ayant été surexposés, il n’en reste plus de mon âge. La responsable en pointe un et tâte le terrain pour connaître son âge et fièrement il proclame : 80 ans jeudi ! Estomaquée, elle réplique, je vous en donnais 65. Ne me les donnez pas, je les ais déjà !
Vif d’esprit en plus.

Après une heure sur le plateau à épier un autre couple « Emmanuel B. et Edith C. se donner la réplique dans le fond de la cuisine du casse-croute, nous faisons la scène qui consiste à nous diriger vers les tabourets et s’asseoir au comptoir. Point. À quelques reprises d’accord, mais point. Ensuite, retour au quartier général mais pas pour longtemps. On a besoin de passants sur le trottoir faisant l'arrière-plan humain d’Émmanuel Bilodeau. Qui n’a pas déjà été un passant dans sa vie ? La seule différence est qu’il faut respecter les signaux, courir pour revenir à sa position de départ et entendre le « moteur ... action » à travers les coups de klaxons et le trafic de 5 h. Nous avons exécuté allègrement nos allers-retours pendant une demi-heure, une dame en faisait elle aussi, bénévolement (elle attendait quelqu’un !), et nous trouvait bien comiques de faire semblant.

C’est vrai que c’est comique "faire semblant", surtout d’une manière aussi sérieuse, et coûteuse.

Jeudi, avec cette même équipe, le tournage sera de soir-nuit et cette fois, le plateau sera dehors. Pour faire quoi, comment, où, qui, et avec qui ? Je le saurais la veille, en autant qu’il y ait un lendemain puisque s’il pleut, le voyage est annulé ... même si la valise est prête.

Quand je vous dis, l’aventure ! Du "faire semblant" et de l’aventure. De l’enfance à la manière adulte.

* * *
N.B. : Même si figurante d'ambiance, je n'ai pas l'impression d'arriver à vous rendre l'ambiance qui règne sur ces plateaux ...
Article de Hugo Dumas qui en dévoile long sur la série.

vendredi 22 mai 2009

Un après-midi de septembre - Gilles Archambault

Bizarre un peu, j’ai commencé par rencontrer l’homme avant l’auteur. Ce qui est plutôt rare, notons-le, et involontaire, notons-le aussi. C’est que je pensais que cette mince plaquette était un roman. C’est un cadeau, à prendre dans les deux sens ; un cadeau que j’ai reçu et un cadeau pour les assidus lecteurs de cet écrivain.

Il s’y révèle beaucoup. Il se confie avec pudeur mais sans censure. Avec une lucidité qui abasourdit, surtout quand il en pointe le couteau acéré vers lui. Lucidité ou dureté, je vous laisse en juger...

[...] la Bibliothèque nationale m’a réclamé quelques manuscrits. Il s’en est fallu de peu que je refuse de donner suite à la demande. Je ne crois pas tellement aux papiers que laisse un écrivain. À moins qu’il ne s’agisse de très grands. Ce qui m’exclut.

Sur un ton tranquille, il nous fait le récit de la disparition lente de sa mère. Demandez à un homme de parler de sa mère, et vous le connaitrez mieux (vous voyez mon sourire ?). Il se juge sans se condamner : Je n’ai pas été un fils dévoué. Parler une fois par semaine à sa mère au téléphone, la voir toutes les trois semaines ne fait pas de vous un être particulièrement généreux. Il renchérit: Elle aurait sûrement aimé que je lui propose un séjour commun en Europe. Je n’ai pas cette générosité qui aurait consisté à participer à un de ces voyages organisés ... Cet homme est marqué par sa mère : Ma mère m’a laissé plus que des souvenirs. Elle est inscrite en moi à tout jamais.

Je lui ai trouvé une habileté de conteur détendu. Il vogue d’un souvenir à l’autre avec une logique que lui seul connaît. Je me suis totalement abandonnée, suivant le courant de sa pensée glissant sur une eau calme. Même son ressentiment contre son père prend un ton apaisant ! À force d’y faire allusion, vous allez croire que je me suis ennuyé mais justement, non. Est-ce parce que le sujet de l’accompagnement d’une mère amoindrie, et ensuite amèrement regrettée, m’était si familier que j’avais l’impression d’en faire partie ? Il décrivait des émotions si semblables à celles que j’ai éprouvées que je me suis passé la remarque, voilà peut-être la définition d’un bon écrivain, celui qui décrit dans un langage tel que tout le monde s’y reconnait.

Mais attention, Gilles Archambault ne pose pas le même regard que moi sur les écrivains :
Ma mère a tenu pendant quelques années son journal. À ce jour je ne l’ai pas lu et n’en ressens pas le besoin. [...] L’écriture n’a pas dû lui permettre d’aller au-delà des confidences qu’elle me faisait. Seuls les écrivains sont des profanateurs.

Le refus de lire le journal de sa mère dévoile beaucoup sur lui. J'en ai été grandement surprise. Un écrivain qui décide de consacrer un livre complet sur le seul sujet de sa mère et qui refuse de lire son journal parce qu’elle n’aurait pas la fibre d’un écrivain me plonge dans la perplexité. J'ai toujours pensé que lorsque l’on aime quelqu’un pour qui il est, et non pas soi à travers lui, de vivre ses émotions à travers son écriture devient précieux.

J’en suis venue à la conclusion, et finalement tout ce récit la corrobore, cet homme a été aimé de sa mère. Et ce n'est pas tant sa mère qui lui manque que l’amour de celle-ci. Bon, je m’éloigne de la littérature et patauge dans la psychologie. C’est le risque inhérent des récits, surtout quand il porte sur la mort d’une mère ce qui nous arrive(ra) tous un jour.

Vous voulez connaître l’homme derrière l’auteur, ce récit ouvre une porte. Personnellement, j’y suis entré avec plaisir et maintenant je désire connaître l’écrivain. Par où commencer ?

En quarante années de carrière littéraire, marquée notamment par le Prix du Gouverneur général (1987) et le prix David (1981), Gilles Archambault a publié une vingtaine de romans et de recueils de nouvelles, des chroniques, du théâtre, qui forment aujourd’hui une œuvre considérée comme l’une des plus riches et des plus personnelles de la littérature québécoise.

mercredi 20 mai 2009

Whisky et Paraboles - Roxanne Bouchard

J’ai découvert ce titre grâce aux blogues. J’y ai lu tant d’apologies que mes attentes étaient élevées, on le sait, c’est dangereux. Ce roman, parti gagnant avec son Prix Robert Cliche 2005 est présenté sous forme de journal et Élie qui le tient a de ces envolées poétiques des plus avenantes. J’aime la poésie particulièrement quand il y a une histoire et ici, chose plus rare encore, elle s’additionne de paraboles.

Une femme vient se réfugier dans un bled perdu, elle fuit une portion de sa vie. Comme toute personne qui vient se terrer dans un trou, elle veut avoir la paix de l’esprit et même se le geler, et c’est à l’aide de whisky dans le bar du village. Amorosa, petite bonne femme de 8 ans vient détourner le destin, en déposant sa détresse et sa sagesse sur le seuil de la maison d'Élie. Et encore, si ce n’était qu’elle, tout l’entourage d’Élie s’y mettra, un véritable complot pour la pousser à sortir du silence où elle n’écrit plus aucune ligne de sa vie. Le silence tourne le dos à l’engagement. Elle qui prétend vouloir écrire un autre chapitre de sa vie est incapable de tourner la page.

La relation de cette mère adoptée par une petite fille, d’assister à cet apprivoisement digne du Petit Prince (ici, une petite princesse) est ce que j’ai préféré. On aime voir un enfant sauvé par un adulte lui-même sauvé par un enfant. S’apprivoiser, c’est accepter de s’engager et à mes yeux, l'engagement en est le thème central. Plusieurs personnes tournent autour d’Élie, à commencer par son voisin vedette de la musique enseveli sous des tonnes de lettres d’admiration. Et qu’il n’ouvre jamais. Aucune.

- Quand on ouvre une lettre d’amour, quand on la lit, on est interpelé pis c’est difficile, après, de ne pas se sentir concerné, de faire comme si ça existait pas, de porter le poids de cet amour-là sans y répondre. Lire une lettre d’amour, c’est s’engager à quelque chose.
- À quoi ?
- À être responsable de la réponse.

Il y a Manu, un pianiste déraciné, André, un violoniste qui pleure sa généalogie, et le fantôme d’Élie, celui qu’elle attend : un mandoliniste. La musique que fait Élie est le son des mots, fée qui les aligne sur une portée à notre portée, les relie, les fait danser comme dans une fable, un rêve, un conte. À la Fred Pellerin tiens, pour tous les personnages de village bien ancrés et typés, et colorés si foncés exprès qu’ils déteignent sur nous. Qu’on les réclame pour venir habiter le vrai. Un roman de voyage courant sur la frontière de la réalité et du rêvé, où la poésie exulte par les pores du papier, suivant le fil volatile d’une poésie fantaisie.

Quitte à passer pour une trouble-fête, il faut absolument que je fasse mention de ce j’appelle un tic de style qui m’a rapidement agacé, et à la longue exaspéré, et c’est la manie de couper les phrases et de les finir avec que. Ou et. Et même et et et. Le texte en est surchargé et contrairement au tic, il est clair que c’est volontaire mais, personnellement, j’ai trouvé cela superflu et dérangeant.

Ce qui ne m’a pas empêché d’apprécier ce roman à saveur accentuée de conte, d’épistolaire, et d'hommage à l’enfance :

Amorosa,
Le sel de ma terre, le rire de mes soleils levants, la lune de mes hivers si blancs. Les semis dans le printemps. Amorosa, sans tes voyelles chantantes qui dansent dans l’été, le monde se fane. Amorosa, toi seule donnais des montanges de bottines à la mer, des dragons à mon frère, des débâcles à Manu, des gestes au conteur, des couleurs à l’automne, des bonbons à l’Halloween, une barbe au père Noël.
Amorosa,
Mon ange qui chante.

Billets : de Julie Gravel-Richard (Danaée) et de Jules se livre sur Whisky et Paraboles, Roxanne Bouchard, VLB, 275 pages.

dimanche 17 mai 2009

En récréation

J’arrive sous peu avec mon compte-rendu de lecture de Whisky et Paraboles (me reste que quelques pages à lire) mais en attendant, petite récréation, je sors un peu la tête des sentiers littéraires, mais à peine, le temps d’aborder avec vous un projet qui m'est cher.

Un projet en compagnie de Marc. Vous allez dire que vivre en couple est déjà un projet en soi, en cela vous avez tout à fait raison mais pourquoi ne pas en profiter vu que l’on s’entend si bien (sourire) pour en aborder d’autres ? Comme un petit nid informatique. Un nid mais avec toujours de la place pour le passant, le client, le visiteur ou encore mieux, l’assiduité amicale. Il y aura de tout, satisfaisant plusieurs goûts, je l’espère. À commencer par la section Venise pour le mot, celle de Marc pour l’image.

Une bonne occasion de faire plus ample connaissance avec Marc et son talent pour tout ce qui touche le visuel. Ça passe l’écran de plus en plus. C’est qu’auparavant il dessinait au crayon de plomb, ou au stylo, y ajoutant rarement de la couleur. Tandis que, album bédé oblige, il a appris à manipuler photoshop ce qui lui a ouvert si grand les portes que le voilà engouffré, à en être difficile à écarter de l’écran ! Entre autres, il transforme les photos en y ajoutant son talent de dessinateur, en concevant des couvertures de livres par exemple, c’est assez fascinant, vous le constaterez par vous-mêmes, et si tout va bien, début juillet.

Et moi qui a déjà son espace ici, qu’est-ce que je vais faire là-bas (je ne vous dis pas le nom du futur site tout de suite, nous l’enregistrons mardi). J’ai l’intention de rédiger sous un mode plus personnel me donnant de la liberté dégagée de la mission littéraire du Passe-Mot. Et puis je vais offrir des services, Marc aussi bien entendu. C’était important pour nous de ne pas offrir que des services, nous avons tous les deux le goût de l’interactivité et pour qu’elle soit à son meilleur on pense qu’il faut se dévoiler. Que les gens sachent s’il y a des affinités. C’est important les affinités. Nous avons donc réservé de l’espace pour ce faire. Pour l’échange, le dialogue. Pour entendre l’autre. Peut-être est-ce que je déteins sur Marc car personnellement, c’est extrêmement important de sentir le lien, fil ou filon que je saisis, ou imagine peut-être saisir !, et qui me guide. Voilà pourquoi j’admire tant les écrivains (le chat sort du sac !) pour ce pouvoir de concentration dont ils font preuve, seul avec eux-mêmes, de croire assez fortement à leur parole pour pousser leurs mots jusqu’au dernier : Fin. Le tout couronné de l’effort indispensable à la mise en forme du projet. Et parfois pour seulement aboutir à une belle collection de lettres de refus à la formule bon débarras "vous ne correspondez pas à notre ligne éditoriale". Je fais un vœu de petite fille ici, un vœu de rêveuse, le souhait que chaque prétendant à l’édition reçoive des commentaires pertinents qui le guident vraiment.

Mais retenons combien il est difficile pour l’écrivain d’une première œuvre de se jeter dans la gueule des loups critiques qui n’attendent parfois que l’occasion de hurler leur mal de vivre. C’est compromettant sortir un roman aux yeux de tous, et de cela je continue d’avoir conscience à chaque jour.

Aussi je m’attelle à ce monde de vocation, de passion. Pour les couleurs vivantes qu’il dégage.

Voyez, je ne me suis pas éloigné tant que ça de mon propos ! Il me colle à la peau. Probablement qu’il en sera de même sur la prochaine tribune, et fortifiée parce que conjuguée avec Marc ... je veux dire Marsi !

Un peu en avance (vaut mieux qu’en retard !), à tous ceux pour qui ça revêt une signification : Bonne fête des Patriotes !

vendredi 15 mai 2009

La bar-mitsva de Samuel - David Fitoussi

Après plusieurs hésitations, j'ai intitulé mon billet du 15, jour de La Recrue "Aimez-vous le citron ?" - Ne manquez pas les 6 autres billets.

Pauvre Samuel ! Je le plains. J’enfile sa vision de la vie plus que quelques jours et personnellement je supplie un médecin qu’il me prescrive des antidépresseurs. Cet enfant est déprimé, et étant donné que je suis un adulte, je lis entre ses lignes ; il est en révolte contre sa mère qui, sans lui demander son avis, surtout pas, le retire et pas seulement de son école, le change de continent et l’arrache à son père. Il y a de quoi ne pas être de bonne humeur, vous avouerez.

Alors il colore sa mère rouge colère, le chum de sa mère, leurs amis, les jeunes de son âge, sa sœur, son frère, la copine, les grands-parents, bref cette large fresque d’individus dont l’arrière-plan serait un fond épais de dénigrement barré à grand coups de traits noirs.

Il faut du souffle pour soutenir cette unité de ton pendant trois cent pages, et l’auteur l’a, c’est un point. Le ton ressort d’autant plus que l’action est réduite à sa plus simple expression : un ado qui s’emmerde au Québec attendant sa Bar-mitsva comme une fatalité nécessaire. Avec une action aussi mince, une vision noire charbon, le danger est grand qu’il y ait des longueurs. Il y en a eues, particulièrement pour moi qui ne se bidonnais pas. Des coups de mitraillette de mépris, c’est drôle un moment, un malotru qui fustige tout un chacun avec grossièreté, ça peut être drôle mais quand la sauce s’étire, ça ne goûte plus rien.

À intervalles réguliers, je décrochais. Comment suis-je arrivé à m’arrimer de nouveau à l’histoire, je me le demande encore et me réponds, pour l’aberration tiens. Un simple bon sens me soufflant que lorsque l’on enfile un tunnel aussi sombre, on voit toujours à un moment inattendu scintiller une lueur. Pour Samuel, c’est l’envie d’explorer sa sexualité. On a droit à des vertes et des pas mûres, c’est plutôt distrayant. Lui, c’est ce qu’il le raccroche à l’envie d’être en vie. Il ne veut pas décevoir son Rabin non plus. La culpabilité le maintient en mode survie, ne pas avoir l’air d’un cave à sa Bar-mitsva, le rite symbolique du passage de l’enfance au monde des adultes.

Ce roman, je ne l’ai pas vécu de la même manière pendant qu’après la lecture. Pendant, j’étais tellement excédée, cette émotion n’aide pas à apprécier le « comment », l’habileté de l’écrivain à raconter par exemple. Une fois le livre déposé, j’ai développé de l’indulgence, me disant que ce n’était pas si mal.

En dernière instance, je rajouterais en toute honnêteté que son appréciation dépend essentiellement de ce qui nous fait rire ou non dans la vie. Et l’humour, c’est comme le goût du citron, on aime ou on aime pas, mais ça ne se discute pas. Alors ceux qui ne se lassent jamais de la raillerie caustique, qui en mangent sans restriction jusqu’à s’aciduler l’esprit, eh bien moi, je vous conseille de faire la connaissance de Samuel.

N.B. : Personnellement, je suis charmée par la couverture de ce roman. Irrésistible !

jeudi 14 mai 2009

Vite et vrac

Le mot sans image aurait l’air piteux
Chez Chantal Guy ça discute bande annonces afin de faire vendre de la copie. Copie sous forme de roman, mettons. La discussion est intéressante, cependant le phénomène n’attendra pas notre avis pour s’étendre à grandeur planétaire. Je sens que l’utilisation de la bande annonce va se répandre à la vitesse du cent images vaut le million de mots. Si vous jetez un œil sur la discussion, vous pourrez jeter l’autre (œil) sur trois bandes annonces

Droit d’auteur sur le net
Cuneipage a titré son dernier billet « Copier c’est niais ». Le titre m’a attiré, il est incontournable, le propos encore plus. Là aussi, il y a matière à débat.

Aux amateurs de Tarmac, un cadeau
Nicolas Dickner fait un cadeau à ses lecteurs. Il nous laisse fureter à la source de Tarmac, ouvre l’utérus là où logeait deux textes précurseurs de la naissance. En direct de sa page web personnelle.

Pour un lecteur averti : tous les Prix
Une récente initiative de notre gouvernement « Bibliothèque et archives nationales » nous donne source et description de chacun des Prix littéraires au Québec. J’ai déjà une demi-heure de passé là et je vais y retourner aussitôt que possible.

Finissons en beauté
Littérature et beauté sont intimement mêlées. La littérature exprime la beauté. La beauté peut relever de la littérature. Les écrivains sont parfois laids ou beaux. Souvent justes invisibles ... (la suite chez Fluctuat.net)

Mesdames et monsieur, ça vous tente de rencontrer le 9ième plus bel écrivain de cette liste ? Après Lord Byron, Christopher Marlowe, Arthur Rimbaud, Jack Kerouac, Paul Laurence Dunbar, Bret Easton Ellis, Casanova, Francis Scott Fitzgerald, il y a Marc Lévy, Florian Zeller étant bon dernier.

Eh bien, ce Marc Lévy et son « joli minois » (c’est Le libraire qui l’a dit, pas moi !) vient vivre deux jours à Eastman. Pas chez moi, non, mais vraiment pas loin. Dans le cadre des Correspondances d’Eastman du 6 au 9 août. On est chanceux par ici ... hum ?

mardi 12 mai 2009

Paul à Québec - Michel Rabagliati

Je ne savais pas que l’on pouvait éprouver des émotions aussi fortes en lisant une BD, peut-être parce que toujours marquée par mon enfance où la BD, c’était des comiques, les Tintin seulement trouvant un peu grâce aux yeux des adultes. Et encore ! On demandait à l’enfant : Est-ce que tu lis ? Il répondait « Oui, des BD ». Non, je veux dire des livres, avec une vraie histoire ...

La BD rejoint aussi les amateurs d’histoires bien écrites à saveur humaine, et après cette lecture, j’en suis convaincue plus que jamais. Dès les premières pages, je me suis plu à voir un auteur expérimenté installer son histoire, préparant le terrain avec beaucoup de naturel. Sans effort, comme le souffle qui sort d’une bouche pour parler. Comme les conteurs d’antan qui réchauffaient la salle avant de se lancer au cœur de leur conte. Ce n’est pas parce qu’on ne voit pas les fils maniés par un auteur que l’habileté n’est pas là, ce serait même le contraire.

Case après case, on s’invite doucement dans la belle-famille de Paul. C’est le temps ou jamais de le dire ainsi ; on se familiarise. On crée des liens, on s’attache. Il est facile de se mirer dans leurs habitudes, cette famille est comme tout le monde, assez pour douter que ce ne soit pas de la nôtre. À mes yeux, c’est fort. Avec des dessins, des mimiques, des dialogues, je les entendais, vivais avec eux, projetée dans cette histoire qui devenait la mienne.

Dès les premières pages se dégage un parfum de nostalgie du temps qui passe, se déroule sous nos yeux son fil que l’on remonte pour attraper des événements emportés sans possible retour en arrière, le non à l’indépendance du Québec étant un de ceux-là. Par des dessins pleine page, le bédéiste nous montre le avant et le maintenant du village St-Nicolas. Tout l’album est empreint du mouvement du temps qui passe et pousse à agir, du petit logement rudimentaire abandonné pour l’achat d’une maison délogeant une vieille dame, l’avènement de l’Internet dans la vie professionnelle de Paul (vraiment trop drôle !). Le bédéiste met la table, nous sert des apéritifs, nous réchauffe pour bien accueillir le summum des affres du temps qui passe : le cancer de Roland, le beau-père de Paul.

Une histoire axée sur la perte pourrait se qualifier de trop dure à lire et à regarder mais ce n’est pas le cas. C’est un art accompli que je lui trouve à Michel Rabagliati de donner au quotidien ses lettres et images de noblesse. On ne se bat pas contre l’inévitable, c’est plutôt l’acceptation de la quotidienneté des liens entre les êtres. C’est ce qui m’a renversée. Quand on y pense, quelle force a cette histoire de se tenir si près des règles de la vie qu’elle suscite un intérêt fort malgré très peu de suspense puisque, dès le départ, nous savons que cette famille perdra un gros morceau, le patriarche. On tourne les pages avec avidité, ouvrant les yeux et le cœur, comme dans la vraie vie où notre intime conviction de finir par en mourir ne nous empêche pas d’en jouir. En autant que l’on ne soit pas seul, la famille faisant toute la différence. Ce Paul à Québec est un hommage non caché à la force familiale.

La progressive détérioration de l’homme fort se vivra enveloppée de l’amour des siens. Le temps qui passe, use et détruit est raconté avec un réalisme cru qui se prend sans la déprime, juste de la saine tristesse. Justement parce qu’il y a plusieurs mains tendues vers cette dureté. La rumeur disait que ce Paul était à lire avec près de soi des papiers mouchoir trois épaisseurs, j’aimerais dire que non mais tout mon souvenir en dormance s’est subitement éveillé, moi c’était une matriarche, et à ma surprise, la digue s’est ouverte. C’est donc bien vrai, mais je l’ai vécue comme une libération de plus pour tout le côté paisible apporté par la présentation de cette perte.

Une histoire si bien racontée qu’elle nous démontre le plus naturellement du monde que nous sommes l'humanité entière à vivre des deuils.

Lien : Le lancement vu par Venise ici.

Paul à Québec, Michel Rabagliati, Éd. La Pastèque, 2009, 187 p.

lundi 11 mai 2009

Gagnants du Prix des libraires

Il n’est pas question de passer à côté d’un SCOOP malgré ma hâte de vous transmettre mes impressions sur Paul à Québec. Quand un billet est fin prêt, je trépigne de vous l’envoyer. Comme une lettre. Tellement frappée je suis par l’idée de courir à la boîte rouge, de lui tirer la langue, d’y déposer mon butin, précieuse hostie avalée goulûment. Sans s’étouffer. Pas vu encore de ma vie de boîte à lettres pleine à régurgiter. Plus souvent qu'autrement, je tends l’oreille pour entendre, le toc du choc sur le métal ou encore le léger bruissement de son aile de papier doucement déposée sur ses consoeurs formant un amas informe avant de devenir cette précieuse missive dans le creux d’une main heureuse.

Mais là, je ne suis pas gentille, je fais pareil à toute remise de Prix qui se respecte, ne respectant aucunement les curiosités avides de savoir, et je discoure, discoure à n’en plus savoir mettre de point final sur le Prix des Libraires – édition 2009.

Je cesse et sortez, je vous prie, vos tambours et trompettes de vos garde-robes ... attention, le nom du gagnant ou de la gagnante est ........

Catherine Mavrikakis et son Ciel de Bay City aux éditions Héliotrope. Ce soir, au Lion d’Or, on lui aura remis un prix d’une valeur de 2 000 $ et d’une grande valeur à ses yeux puisqu’elle avoue beaucoup aimer flâner dans les librairies :
« C’est dans les librairies que je me fais flâneuse. J’aime m’attarder sur des bouquins que je découvre au hasard de mes déambulations. Le livre est une rencontre et je préfère encore le hasard à la blind date ou au mariage arrangé. Je déteste aller acheter un livre dont j’ai besoin, je préfère que les étalages me fassent de l’oeil, que quelques mots me soient dits, qu’une quatrième de couverture me parle et que la libraire me lance négligemment, de loin, que celui-là, oui, en effet, « il est tout à fait pour moi », dans une complicité faite de silences et d’indications presque secrètes ou encore dans un vrai coup de gueule.
- vous avez remarqué, elle a parlé du quatrième de couverture, pas un mot sur la couverture :-) -

Bravo. Je la félicite. C’est un roman qui mérite son Prix.

Et pour la catégorie Hors Québec, pour vous qui savez encore plus ce dont il en retourne que moi qui en lit si peu, le gagnant est ...

Cormac McCarthy, pour son roman La route, paru aux Éditions de l’Olivier.

Ne vous gênez pas de me dire ce que vous en pensez. Et, en passant, un bravo à Réjean pour sa prédiction en plein dans le mil. Finalement, avaient-ils tant besoin de délibérer ces décideurs ... ;-) :

LE COMITÉ DE SÉLECTION 2009

Robert Boulerice de la librairie Le Parchemin à Montréal,
Geneviève Caron de la librairie Renaud-Bray, Côte-des-Neiges à Montréal,
Susane Duchesne de la librairie Monet à Montréal,
Anne-Marie Genest de la librairie Pantoute, succursale St-Roch à Québec,
Julien Lefort-Favreau de la librairie Gallimard à Montréal,
Donald Servais de la Boutique du livre à Québec,
Marie-Hélène Vaugeois de la librairie Vaugeois à Sillery.

Et les régions, elles ?!? J'apprends qu'elles ne sont pas représentées !? Bais coudonc. Une autre chose que je devrais me faire expliquer.

Et là-dessus, je vais quand même dormir sur mes deux oreilles (en rotation cependant), et demain, je vous poste ma lettre ... euh, mon billet !

jeudi 7 mai 2009

Jugez-le sur son apparence

Mine de rien, je vous ai passé une nouvelle chronique avec Marc, Sur la couverture, pif, comme ça, pas un mot à l’avance. Rien. Même pas une question vous demandant si ça vous intéressait le moindrement. Anti curieuse. Anti sondeuse. Anti vendeuse.

Je me reprends et je commence par le commencement : Le livre. Ce dont on ne parle presque pas ici. Je veux dire, oui, on parle des auteurs, des personnages, et plus que tout, de l’histoire. La fameuse histoire, qui accroche ou non. Qui éveille, stimule, endort, ennuie, enrage, touche, dépasse ... et jamais de la même manière d’une personne à l’autre. Mais le livre, on n’aborde jamais le livre. Les 100 ou 1,000 feuilles, savamment maintenues ensemble, le carton, le papier, l’encre, le caractère, oui le caractère, il en a un et même plusieurs. Le type de typos. Et par-dessus tout, la couverture. Aimons-nous les couvertures ? Dans la vie, l’apparence des gens, des objets, des événements, nous nous en soucions. Elle nous fait de l’effet, on y réagit. Il le faut, puisque c’est souvent la première chose qui se présente !

Mais revenons au livre. Vous êtes à la librairie, par hasard, complètement par hasard, sans intention aucune d’acheter, aucun titre en tête. Ni en poche. Même pas en sacoche. Vous êtes libre du livre, et allez à travers les allées sans autre souci que de vous sentir dans une librairie remplie de tentaculaires tentations. C’est juste si certains livres que vous reluquez ne tendent pas le bras pour vous happer vers eux. Que vous les ouvriez. Que vous les touchiez, pour qu’ils vous touchent ensuite, dans l’espoir d’une juste réciprocité.

Et c’est là qu’arrivent mes questions de satanée curieuse qui ne se tanne jamais de vous en poser :

Est-ce que vous êtes influencés par l’apparence générale d’un livre ? Sa robe, son enrobage, sa personnalité. Son image. La couleur de son vêtement, sa jaquette. Son grain de beauté de papier. Son volume. Sa prestance, son élégance. Son cri d’encre. Sa glaçure, son glaçage, son glacé. Son look. L’accroche-œil avant l’accroche-cœur.

Je gagerais que vous serez tentés de répondre « non », loin de moi la satanique tentation de l’apparence, seulement l’apparence, je suis et serai pour toujours et à jamais un être profond sans souci pour la superficielle apparence. Et pourtant, voyez-vous, j’ai un peu de difficulté à vous croire. Un peu. À vous de me déjouer, de vous défendre et de me convaincre de mon tort. Car moi, je l’avoue, je suis influencée par l’aspect du livre. Il me charme et je me pâme. Non pas que je me base que sur l’apparence, non mais quand même, ma mère m’a mieux éduquée que ça ;-) ... mais le look est ce petit plus qui rajoute à l’envie de lui tendre la main, pour ensuite le prendre sous mon bras.

Alors dites-moi comment ça se passe par chez vous ? Suis-je la seule de mon espèce ?

Parce que si oui, il faudrait peut-être en avertir les maisons d’édition. Il y en a quelques unes qui se donnent un surplus d’ouvrage.

mercredi 6 mai 2009

Townships de William S. Messier

... « s’intéresse particulièrement au vernaculaire*, ainsi qu’aux rapports entre oralité, réalisme et réalité ». Ceci expliquant cela. J’avoue, oui je l’avoue, j’ai eu besoin qu’on me situe vis-à-vis cette douzaine de brèves nouvelles nommées "récits d’origine". Les puristes diront que ça va à l’encontre de l’abandon total à un auteur et son univers. Écoutez un peu mon plaidoyer, je tenais à être juste face à ce texte. J’ai tout de suite senti que ma difficulté à apprécier ce style moderne, imagé, si habile à rendre les ambiances venait beaucoup plus de mes limites personnelles que celles de l’auteur. En fait, le style est plus que moderne, il est sauté, ce qui lui confère une originalité certaine. Et avec beaucoup d’assurance.

Je suis donc satisfaite d’avoir continué ma lecture, et même de l'avoir recommencée ! Comment ça, recommencer ? Après quelques nouvelles me faisant vivre une perplexité souffrante, j’ai repris du début en compagnie de Marc. Il a spontanément aimé et m’a amené à ouvrir l’œil et ma faculté à voir les ambiances. J'ai commencé à apprécier ces nouvelles comme autant de séquences de films qui s’animent par de nombreux détails qui projettent dans l'instant, sans passer par des explications. Surtout pas d’explications ! Vous n’en trouverez aucune, ce sont des tableaux par où voyage l’esprit, vous prenez ce que vous voulez, ce que vous pouvez.

Toutes ces histoires se déroulent dans les Cantons-de-l’Est, non loin de la frontière, le borderline, le entre-deux. La dualité de ce latin de Québécois qui rase de près les États-Unis. C’est le temps, je crois, de rappeler ces mots « oralité, réalisme, réalité ». Comment dire mieux ? Ces nouvelles ont toutes un quelque chose tirée de l’oralité, elles sont d’ailleurs transportées par une lecture à haute voix. Et puis c’est le rendez-vous avec l’étrangeté campée avec un réalisme à tout crin qui donne une saveur de franche réalité.

Nouveauté, scoop, nouveauté, scoop ...

Foin de mes propres impressions quand j’ai celles de Marc à vous présenter ! Depuis un certain temps me turlupinait l’idée d’aborder le livre dans son état d’objet. Le livre qui tient au creux de notre main et qui nous charme ... ou non. C’est un produit, ne nous le cachons pas, et si on veut qu’il le reste, ne devenant pas seulement un fichier de plus dans l’électronique, parlons-en !

J’ai placé cette requête à mon illustrateur et graphiste de mari, et pour son amour infini du livre en tant qu’objet, il a accepté. Si je me spécialise sous la couverture ...

Sur la couverture - par Marc
Que voir dans cette forme plutôt bien concoctée ? Tout d’abord, l’américanité flagrante. Le pygargue* ne ment pas. Non seulement il représente nos bons voisins du sud mais également leur influence assurée sur nos us et coutumes. Et cet oiseau, qu’est-il au juste ? Qu’une tête de peluche en fait. Une mascotte dirait-on. L’allégorie populaire par excellence, celle qui, au-delà de personnifier, nous amuse et dont on se moque. Puis, il me semble en ressortir sinon une profonde amertume, du moins une réflexion sur un coin de lit, dans la chambre terriblement neutre d’un motel « vacancy ». La réflexion d’un individu qui, sous ce grotesque casque, se pose face à sa condition. Parce que très populaires, ces récits d’origine n’en sont pas moins lestés d’une identité crue, autochtone, qui nous conduit invariablement à réfléchir aux bienfaits et aux méfaits de notre appartenance.

Et encore, ce graphisme qui tranche sensiblement avec la sobriété des lieux. Un jaune or riche, constellé de micro-étoiles présentant une rutilance solide. Du lingot aurifère ? C’est assurément d’une certaine richesse dont il s’agit ici. La nôtre. Celle que l’on répudie parce que parfois si vulgaire, mais que les nôtres adoptent une fois la porte fermée.

Mise en page et couverture M.-P. Béland.
Photographie de la couverture : Jamie Campbell
Maison d'édition : Marchand de feuilles

* vernaculaire : langue parlée seulement à l'intérieur d'une communauté, souvent restreinte
* Pygargue : Oiseau rapace diurne, brun, à tête et queue blanches, appelé aussi aigle de mer.

mardi 5 mai 2009

Du vrac sans le savoir

Le bourgeonnement des Prix du printemps
Si Tristan Malavoy-Racine, chef de pupitre du Voir section livres avoue quelque difficulté à suivre les Prix distribués au printemps, imaginez moi !

C’est d’une bien drôle de manière que j’ai appris que Pierre Szalowski avait remporté le Grand Prix de la relève littéraire Archambault pour Le froid modifie la trajectoire des poissons (Hurtubise HMH). Ça m’a d’ailleurs coûté deux cartes de vœux. J’étais chez Archambault à Brossard (bais oui, ça m’arrive !), et tout à coup je vois une mini pancarte au-dessus du livre, ce qui attire mon attention, je me penche pour mieux lire, et glissent de mes mains deux des huit cartes que je venais de me procurer en solde à 2 $ (remarquez que je vous dis tout là). Cette idée aussi de ne pas prendre de sac, ni ceux en abondance dans l’auto, pour cette foi de ne jamais rien acheter nulle part, ni ceux qu’on me tend à la caisse. J’en étais si contente que les deux bras m’en ont tombé ... Tristan Malavoy de renchérir : Un succès de plus pour ce roman maintenant traduit en espagnol, catalan (pour ceux qui n’auraient par encore vu la féérique vidéo), italien et allemand et dont les droits ont récemment été vendus pour une adaptation au cinéma.

Marguerite Andersen a pour sa part reçu, il y a quelques jours, le Prix des lecteurs Radio-Canada 2009 pour son roman Le figuier sur le toit (L’Interligne), considérée meilleure œuvre de fiction franco-canadienne publiée au cours de la dernière année.

Lundi, le 11 mai, (déjà !), nous connaîtrons les lauréats du Prix des libraires du Québec, volets Québec et Hors-Québec. Je me suis promis d’être à la cérémonie mais la vie est en train de contrecarrer mes plans. De toutes manières, je serai aux aguets de l’information à apprendre sans perdre la carte... ou les cartes.

Il y aussi le 10e prix Bédélys, qui récompense les meilleures bandes dessinées publiées en français durant l’année 2008. Me voyez-vous ne pas m’y intéresser cette année et devenir tout à coup accro à ce Prix l’an prochain, à vous en rabâcher les oreilles juste parce que Marsi en fera peut-être partie, en tant que bourgeon du monde florissant de la BD !

Il faudra enfin attendre au 25 mai pour savoir qui, de Catherine Lalonde ou Marc-Antoine K. Phaneuf ou François Turcot, remportera le 30e prix Émile-Nelligan, qui souligne la qualité du travail d’un poète de moins de 35 ans. J’avoue être peu au courant, et c’est un peu déplorable. La poésie attire si peu l’attention. Mais Tristan Malavoy-Racine persiste et signe, étant lui-même un poète, il ne manque jamais une occasion de nous en parler.

S’en laver les mains

Vous ne trouvez pas que l'expression est dans l’air du temps ?

Est-ce un clin d'oeil du maître de jeu de citations « espressio » mais c’est la citation du 5 mai. Une gracieuseté d’un passionné des citations, un sourcier, un déracineur d’origine, je vous le dis que j’en ai appris des mots, des anecdotes, des liens, et d’une manière à réveiller mon esprit tout en l’égayant. Quoi de mieux qu’un exemple :

S’en laver les mains : Décliner toute responsabilité de ce qui pourrait se passer.
Ne plus s'en préoccuper.
Aujourd'hui, nous allons évoquer une bien triste histoire vieille de deux millénaires et parler de Ponce. Non pas Pierre, l'homme au tempérament volcanique, mais Pilate.

Ponce Pilate, donc, est procurateur romain en Judée, environ 33 ans après la naissance de Jésus. Et quand on est procurateur, on a des décisions à prendre, fussent-elles lourdes de conséquences. Or, cette fois-là, il doit ratifier la condamnation à mort de Jésus alors que sa femme, à la suite d'un rêve, lui a conseillé de ne pas s'associer au meurtre d'un juste.
Mais la foule excitée gronde et Ponce Pilate voit mal comment il pourrait ne pas lui accorder la victime tant attendue. Alors pour se disculper, il « prend de l'eau et se lave les mains en présence de la foule en disant : je suis innocent de ce sang, c'est désormais votre affaire ». Les Juifs, sans imaginer non plus les conséquences, acceptent que le sang retombe sur eux et leurs enfants, puis s'emparent de Jésus pour le crucifier.
Et c'est à partir du moment où n'y a plus eu de Pilate dans l'avion que les choses ont vraiment mal tourné pour Jésus.

C'est de ce lavage de mains 'purificateur', permettant de s'exonérer de la responsabilité d'un acte, que notre expression est née.

Pour vous abonner à espressio, et recevoir ces belles histoires de mots dans votre boîte à courriels, c'est ici.

samedi 2 mai 2009

Entrevue avec Michèle Plomer (auteure de HKPQ)

1. Vous quittiez Magog pour la Chine le 27 février *, combien de temps y serez-vous et serait-ce indiscret de vous demander ce qui vous y amène régulièrement ?
Je suis restée en Chine deux mois cette année, de la fin février à la fin mars. C’est l’amour de la Chine du Sud qui m’y emmène et des contrats de formation de professeurs chinois qui enseignent l’anglais dans diverses universités qui financent cet amour!

2. La Chine est d’une telle importance dans votre roman HKPQ, alors, parlons-en !
a) En quelle année et qu’est-ce qui vous a amené en Chine la première fois ?
J’y suis allée fin 2004 la première fois. J’y allais pour un contrat d’enseignement de trois mois et j’y suis restée trois ans! Il faut dire que je rêve de la Chine depuis que j’ai cinq ans. Depuis mon premier egg roll dans le Chinatown de Montréal!!

b) Quelles ont été vos premières visions, sensations, émotions ?
Le choc! La Chine ne ressemble en rien à Tintin et le Lotus bleu. J’ai passé deux semaines au lit dans une chambre d’hôtel. J’ai fini par me saisir et comprendre qu’il fallait que je travaille pour gagner assez de sous pour mon billet de retour. Et sans m’en apercevoir, j’ai été séduite. Je ne suis pas une fille de coups de foudre.

c) Le regard se transforme au fil du temps, quels sont les principales différences entre votre Chine d’alors et celle qui vit dans votre regard maintenant ?
L’affection. J’aime la Chine avec ce qu’elle a de merveilleux et de difficile. Je l’aime comme j’aime une amie et comme j’essaie de m’aimer, avec ses qualités et ses défauts. Je n’attends rien d’elle. Nous n’avons plus de preuves à nous faire.

d) On dit "voir Venise et mourir". Qu’est-ce que vous diriez pour nous convaincre de voir Hong Kong et mourir ?
Elle disparaît. Hong Kong se ‘chinoise’ à une vitesse folle. Ce mariage extraordinaire d’Est et d’Ouest, de Britannique et de Cantonais est déjà déséquilibré. Le gouvernement chinois veut effacer les traces de colonialisme depuis la rétrocession de Hong Kong à la Chine et tous les moyens sont permis. La ville que j’ai vue pour la première fois en 2004 et celle que j’ai revue ce printemps n’est pas la même. Il faut y aller le plus rapidement possible pour être témoin de sa splendeur. Un journaliste chinois me demandait dernièrement si j’étais allée voir Beijing depuis la construction des nouvelles installations olympiques. Je lui ai répondu qu’elles y seraient longtemps, alors que je m’étais empressée d’y aller avant la démolition massive de quartiers historiques afin d’en être témoin, de leur rendre hommage et de les garder en moi. Mais je sais que mon attitude est très occidentale.

e) Est-ce que vous lisez dans une autre langue que le français ? Que lisez-vous pendant votre séjour en Chine ?
Je lis en français et en anglais. Beaucoup! Par contre, quand je suis en Chine il me semble que j’ai toujours le nez dans un dictionnaire mandarin ou cantonais selon les besoins et que je deviens hypnotisée par les caractères d’écriture qui m’entourent. J’essaie d’en faire du sens et je fais rire mes amis chinois.
Pendant ce séjour un collègue français m’a prêté L’art du maquillage, de Sergio Kokis. J’ai été obnubilée! Je ne connaissais pas cet auteur.

f) Pensez-vous qu’il y a des chances que vous soyez un jour traduite en mandarin ? Imaginons un instant que vous l’êtes, que diraient les Chinois de HKPQ ?
Je crois que les chances sont bonnes. Voyez comme je suis chinoise! Je crois qu’ils seraient heureux de voir qu’un écrivain occidental s’intéresse à eux avec un œil contemporain. Je crois qu’ils en ont parfois marre que les Occidentaux ne s’intéressent qu’aux pieds bandés de leurs grands-mères et des cent coups de leurs empereurs. Ils trouveraient aussi que je n’ai pas tout compris. :-)

3. Quelle est la (ou les) remarque qui vous a le plus étonné de la part des lecteurs de HKPQ ?
Plusieurs lecteurs ne veulent pas croire que Poissonne n’existe pas et que le Milk Sperm Fish est une pure invention. Quand je reviens à la charge… en douceur… ils sont tristes. C’est comme s’ils avaient perdu une amie.
Aussi, certains lecteurs m’ont dit avoir de la rancœur par rapport aux gestes de Ju Lin et de ne pas être capable de décider s’il a eu tort ou raison d’agir comme il l’a fait.

4. Y a-t-il des idées, une tournure de pensée, un angle que vous n’aviez pas vus à l’écriture et que certains lecteurs ont amenés à votre attention ?
Plusieurs. Plusieurs. Un livre contient autant d’histoires qu’il y a de lecteurs. C’est tellement magnifique de pouvoir rencontrer les lecteurs et de pouvoir les partager. C’est un cadeau pour moi.

5. De quelle manière avez-vous accumulé votre information pour nous entretenir de Poissonne avec autant de familiarité et d’amour ?
Ça fait plusieurs années que j’observe la relation des gens en Chine avec leurs poissons et leurs oiseaux. Ce sont des relations tendres, alors que les Chinois ne sont pas portés sur l’expression de la tendresse. Je la portais en moi depuis des années. Je l’aimais tellement aussi. Mais pour la sortir de moi, la matérialiser, j’ai regardé des photos de fœtus humains dans des manuels de médecine. Je l’imaginais aussi précieuse qu’un fœtus et avec les mêmes couleurs sidérantes. Ça a été bouleversant de me voir confirmer que tous les organismes vivants se ressemblent. Je me disais la même chose en regardant ma rhubarbe sortir de terre ce matin. Ses pousses nouvelles ont des couleurs humaines.

6. Ne parlons pas du premier jet d’une histoire, mais à l’étape du remaniement, comment procédez-vous ?
Je remanie à quelques reprises, car je travaille avec une idée claire du parcours de l’histoire, néanmoins sans plan. Ce qui est le plus important pour moi c’est de faire des lectures intégrales de ce que j’ai écrit pour avoir une vue d’ensemble sur l’histoire. Les remaniements servent à rendre le tout cohérent. Et je sens continuellement le besoin de travailler et retravailler et travailler encore les mots pour que les idées soient limpides. Je connais bien la Chine et je vois l’histoire comme une bande dessinée dans ma tête, alors il faut que je me demande : est-ce que le lecteur comprendra? Est-ce que je lui donne suffisamment de détails pour qu’il soit situé, etc.

7. Qu’est-ce que vous aimeriez que l’on dise de vous en tant qu’écrivain quand vous serez disparu de la Terre ? En tant qu’être humain ?
Ça fait 48 h que j’y pense et rien ne me vient. Je crois que ce que les gens pensent de moi m’est égal. Il faut que je sois capable de rencontrer mon regard dans le miroir.

8. Quels sont les points communs entre les Chinois et les Québécois ?
Ce que nous avons en commun avec tous les autres : nous voulons être heureux et ne comprenons rien à notre existence!

9. Suivez-vous l’actualité du Québec quand vous êtes en Chine ? Si oui, qu’est-ce qui vous a le plus frappé dernièrement ?
On n’a pas accès aux médias dans une langue autre que le mandarin ou le cantonais en Chine. Il y a quelques journaux de piètre qualité qui remâchent ce que le gouvernement veut bien qu’on lise. Aussi, je ne suis pas très portée sur l’Internet, donc non, quand je suis en Chine c’est une brisure avec le Québec. À part que ce que famille et amis rapportent au téléphone.

10. De quoi vous ennuyez-vous le plus durant votre absence ?
Du ciel bleu. Un smog gris couvre le ciel presque tous les jours en Chine du Sud. Et le fromage :-).

11. Qui a eu l’idée du titre HKPQ ? Quels arguments cette personne a-t-elle utilisé pour le vendre ?
C’est moi. Mélanie Vincelette, mon éditrice chez Marchand de feuilles a tout de suite aimé. Encore, j’ai eu de la chance!

12. Quel est le livre dont vous avez le plus souvent conseillé la lecture à votre entourage ?
Paris de ma fenêtre, de Colette. Un bijou. Colette était amoureuse de la vie.

13. Une cliente dans une librairie demande à la vendeuse pourquoi elle achèterait HKPQ, soufflez-lui une réponse.
Encore une question à laquelle je ne trouve pas de réponse. Je pense que c’est le destin qui nous fait mettre la main sur un livre que l’on aimera. Et il y a tant de bons livres…

14. Parlez-nous de votre troisième roman : encore dans les limbes, en voie de conception, déjà un fœtus ? Québec ou Chine ? Ni un, ni l’autre ?
Je suis de retour au travail d’écriture avec beaucoup de joie. Je retrouve mon équilibre! Je baragouine les premiers mots…ça me prendra un peu de temps avant de trouver la confiance d’en parler. Mes débuts de relation avec une histoire sont toujours difficiles, même si le travail des mots est indispensable à mon bien-être.

Michèle Plomer est auteure de HKPQ, une histoire que j'ai beaucoup aimée. Mon compte-rendu de lecture et la critique du Voir.

* l'entrevue a voyagé dans le temps une couple de mois !