Faites comme chez vous

Faites comme chez vous
c'est recevant !

jeudi 31 mars 2011

Vric-à-Vrac

Deux femmes :
Les prix de création de la ville de Québec ont reçu 68 œuvres. Parmi ces titres, c’est Johanne Mercier qui s’est vue attribuée la récompense (5,000 $) dans la catégorie Littérature jeunesse pour Mes parents sont gentils… mais tellement paresseux! aux éditions FouLire, et Dominike Audet l’emporte dans la catégorie littérature adulte pour L’âme du minotaure, paru chez VLB.

Le livre sur la sellette à Pâques
La journée mondiale du livre et du droit d'auteur tombe la fin de semaine de Pâques ! Il me semble que c'est à l'avantage du livre. Ce congé incitera les gens à opter pour des activités autour du livre.

En cette 16ième édition, la JMLDA mettra en vedette les personnes qui font la promotion du livre à l’extérieur des institutions que sont les librairies, les bibliothèques et les écoles. L’accent sera mis sur les médias, les événements et les festivals, les forums, les chats, les blogues littéraires, ainsi que les clubs de lecture et toutes les personnes qui transmettent le goût du livre par le bouche à oreille.

Je me sens interpelée ! D’autant plus que c’est la date anniversaire du Passe-Mot qui aura alors 4 ans ! Il n’est pas trop tard pour organiser une activité mais trop tard pour les demandes de financement qui prenaient fin le 9 février. J’ai pourtant contacté l’organisme mais rien n’était prêt, je n’ai donc pas obtenu l’info de cette date limite.

Un principe d’auteur d'une valeur de 96,000 $
« Je suis très flatté d'être nommé au prix Man Booker International 2011, Malgré tout, je refuse de concourir pour des prix littéraires. » John Le Carré, cet auteur passé maître des livres d’espionnage (La maison Russie) désirait qu’on le retire de la liste, et cela malgré que le Prix soit accompagné d'une somme de 96,000 $ US, ce qui lui fut refusé par le président du jury Rick Gekoski qui a allégué qu'on l'admirait trop pour satisfaire à sa demande !!!

Archibald a 70 ans
Qui est cet Archibald ? Indice : c’est un « marin bourru et jubilatoire au comique franc et généreux ». Il y a 70 ans naissait cet alcoolique de tonnerre de Brest de capitaine Haddock !
En 1941, dans Le Crabe aux pinces d’or (9ième album), Tintin qui se retrouve prisonnier par l’équipage du cargo Karaboudjan découvre le capitaine Haddock qui deviendra son coloré acolyte.

Salon international du livre de Québec
Même si Marsi n’offre pas de séances de signature cette année, nous y serons. Je préfère ce Salon à celui de Montréal, j’avoue. Peut-être est-ce parce que nous adorons Québec, que nous nous y sentons en vacances et que la distance qui la sépare de notre domicile justifie l’escapade dans un gîte !

Malheureusement, nous n’y serons pas durant la fin de semaine, mais le jeudi et vendredi uniquement. Ce qui veut dire que je vais manquer deux auteurs blogueurs que je tenais beaucoup à rencontrer : Sylvie Gaydos (Impasse) et Pierre H. Charron (L’Incident). Je fais confiance à la vie, elle va nous ménager d'autres occasions. Après tout, ces deux opus, Impasse et l’Incident en sont à leur début de vie. Cette fois-ci, la rencontre passe par l’auteur avant le livre, d’autres fois c’est l’inverse. Notre horaire nous permettra cependant le lancement du dernier Faüne 3 – Sabots de neige de Paul Bordeleau. On s'en réjouit.

Je viens à l’instant de détailler les activités du vendredi au Salon. Je vais finalement en avoir pour ma grosse dent !

Et puis, on va en profiter pour aller voir si le printemps est plus vert chez le voisin ...

vendredi 25 mars 2011

Gouverneurs de la rosée - Jacques Roumain

C’est la première fois que je commente le livre d’un village... et mon village ! Je me suis infligé un peu de pression. Ce qui m’a soulagé d’une part de stress est de débusquer l’obligation que je sentais d’absolument encenser l’élu. Ce roman m’a été présenté comme un chef-d’œuvre. C’est évident que les attentes sont grandes vis-à-vis un chef d’oeuvre !

Imaginez-vous partir en voyage pour Haïti autour des années 1944 (année de la publication et du décès de l’auteur) pour résider durant 147 pages dans un minuscule village où la sécheresse éteint chaque parcelle de vie. Certains habitants, pourtant amoureux de leur terre nourricière, commencent à regarder la sortie de secours ; l’exil. Arrive de Cuba l’enfant prodigue, un sauveur, Manuel, fils de ses vieux parents Bienaimé et Délira qu’il retrouvent après plusieurs années. Par lui, le village passera par tous les états.

Cette recommandation en début de roman est précieuse :« rendez-vous au moins à la page 30 avant de vous sentir bien à l’aise avec les personnages, le style et le langage coloré de l’auteur ».

Ma lecture a avancé très lentement. J’avais besoin de ruminer chaque information apprise en tournant les pages, et pas seulement les trente premières. J’ai rarement lu aussi lentement. Même quand l’intrigue prend, comme un feu de broussaille allumé par un personnage fort, Manuel, je tenais mordicus à continuer d’avaler chaque mot comme la gorgée d’un nectar que je n’avais jamais goûté auparavant. Je me tenais aux lignes comme à des bouées, pour ne pas me perdre dans cet univers si différent de mes points de repère. Aucun besoin pour l’auteur d’user de stratèges pour mystifier l’intrigue, juste de nous amener avec lui dans l’observation des règles de vie à Fonds-Rouge, de ses paysages et ses mornes, ses cases, ses compères et commères, ses bons nègres et petits nègres m’a tenu en alerte. Cette nouvelle réalité pour moi, ce nouveau langage, me faisaient frôler le sentiment d’errer sur une autre planète.

La lectrice que je suis a découvert que sous ses apparences inaccoutumées ce pays est comme tous les autres pour cette règle universelle ; quand la misère est insoutenable, on s’entremange. Et les colères fermentent en vengeances. Des clans se forment dans un si petit village où l’union devrait être sa force pour se sauver d’une extinction progressive.

Il importe de conserver le cap sur l’année où se déroule l’action : 1944. Si j’y fais allusion, c’est que personnellement je connais Haïti surtout pour son ici et maintenant. Avec les Gouverneurs de la rosée, nous avons affaire à un roman qui transporte son lot de vieilles valeurs.

Les tensions parcourt tout le village, pas seulement la petite famille de Manuel et ses parents. Les dialogues sont théâtraux et certaines répliques s’approchent de l’art oratoire. On ne peut pas parler de style naturel, en tout cas pas du naturel auquel nous sommes habitués. Cependant, ces dialogues paraissent à peine empruntés, tellement le style charrie sa richesse d’images et de symboliques. Le rythme n’est pas soutenu, on y trouve des longueurs, ou peut-être devrais-je parler de langueurs. La chaleur plombe, assèche, fige même les pensées. J’ai lu ces langueurs à la quêtes de phrasées qui enchantent, allègent et redonnent l’élan pour aller de l’avant. Parce qu’il y en a tant à cueillir de ces mots joyaux .

Ce qui m’a le plus enchanté ? Le sentiment d’inconnu et certainement la langue poétique, impérissable, qui se fout du temps qui passe. Et le message rassembleur.

Et l'histoire riche en thèmes forts : vie, village, terre, eau, vengeance, source, se souvenir, solidarité, sauveur, sacrifice, soumission, exploitation, exil, loyauté, sentiment maternel, attraction homme-femme, respect pour l’âge.

mardi 22 mars 2011

Notre littérature illustrée

Il y a de ces décisions non calculées. Ma décision de lire et de commenter du « jeunesse » en plus de l’adulte en est une. Je découvre les raisons après ! Mes détracteurs me traiteront d’inconsciente, mes sympathisants, je l’espère, d’intuitive !

Mon intérêt pour la littérature illustrée a grandi très progressivement. Il me faudrait des repères, ces traits qu’on trouve sur le cadre de la chambre d’un enfant, tellement le mouvement de croissance a été insidieux. MARSI qui dessine tout le temps a ouvert une fenêtre. Je ne peux pas le nier. Mais qui peut se targuer d’automatiquement se passionner pour le travail de son conjoint-e ? Il aurait pu arriver le contraire. Le dessin fait tant partie de lui, c’est comme le voir respirer, c’est extraordinaire respirer, mais en fait-on tout un cas !

Je fais le bilan du chemin parcouru. J’en suis maintenant à me retenir de lire des albums de bande dessinée tandis qu’auparavant je me forçais ! Je me préoccupe des enfants qui poussent autour de moi, que leur désir de lire pousse en même temps que leurs jambes. La meilleure manière est de se pencher sur ce qu’on leur offre comme première lecture. Et puis, le phénomène facebook, m’amenant à me lier avec plusieurs auteurs de littérature jeunesse a joué. Je ne sais pas qu’est-ce qu’ils ont ces gens à être aussi sympathiques ! Peut-être ont-ils un cœur jeune, comme le mien, qui sait. J’ai commencé à suivre des sites d’auteurs illustrateurs, d’abord avec curiosité, et maintenant avec convoitise.

Je me suis retenue longtemps pour ce qui me semblait une problématique : comment m’improviser commentatrice sans être la clientèle cible ? Comment puis-je parler au nom des enfants ? Mais mon idéalisme de faire parler les enfants s’est vite frappé à cette constatation, chaque fois que j’ai demandé à un enfant de commenter un roman, il ne trouvait pas les mots.

Je me suis donc donné la mission de lire du québécois après avoir constater un besoin, pour la littérature « jeunesse », j’ai commencé avant d’en connaître le criant besoin. Ces jours-ci, tout concourt à le confirmer ce besoin :

«Il est utile de se rappeler qu’un journal qui donne à tous les jours le tiers d’une page pour l’astrologie pourrait bien donner le tiers d’une page quelques jours par semaine pour la littérature jeunesse.»
Yves Nadon, enseignant et éditeur aux 400 Coups - tiré d'une lettre ouverte au Voir

Jeudi, le 17 mars dans Cyberpresse « La lecture jeunesse et les médias », article que j’ai abordé comme un miroir sur nos contradictions. J’ai retenu que si on veut que nos jeunes lisent, il faut donner à la littérature jeunesse la même place qu’à celle des adultes. Lui faire de la place, c’est l’estimer. C’est sûr que si les adultes ne l’estiment pas, comment demander aux jeunes de le faire ?

Et saviez-vous ce qui a été annoncé pas plus tard que 9 mars 2011 ?

L’Association des libraires du Québec a annoncé la création d’un volet Jeunesse à son prestigieux Prix des libraires du Québec, solidifiant ainsi un partenariat de longue date pour promouvoir la littérature et la lecture chez les jeunes. Atteignant ses dix-huit ans cette année, le Prix gardera ainsi son coeur d’enfant... extrait d'un communiqué de presse.
N.B. : Les premiers lauréats seront récompensés dès septembre 2011.

Je porte à votre attention le rajout de la catégorie "Du mot et de l'image" détaillant ces sites que je ne fréquenterai plus en cachette :-)

Image en-tête de Michel Rabagliati, illustrant un article du Devoir - "Livres - Jeunesse d'aujourd'hui" paru en mai 2003

samedi 19 mars 2011

C'est à moi ! - mon imagier

J’attaque officiellement ma nouvelle catégorie “jeunesse”. J’en profite pour mentionner à ceux, plus nombreux qu’on le pense, qui n'ont pas découvert que les catégories, aussi appelées tags sont cliquables à la toute fin du billet pour voir défiler toutes les critiques catégorie "Jeunesse".

Je compte procéder différemment de l’adulte, après un bref résumé, j’irai avec un - j’aime plus - j’aime moins - je m’interroge.

C’est à moi ! – mon imagier

Résumé
Album sur papier glacé, même qualité qu’un magazine, contenant diverses photos reflétant l’univers familial d’un enfant. On y trouve le nom des choses, des gestes, des gens souriants ; famille et amis. Huit sections se succèdent :« La famille », « Le bébé », « Le corps », « La salle de bains », « Les vêtements », « La chambre », « La cuisine », « Le jardin » . Au début et à la fin, une mosaïque de plusieurs photos de l’album.

J’aime plus
La couverture et son idée géniale des cerceaux de couleurs. L'impression de trois dimensions est réussie. J'aime l'idée supposée que tout s’imbrique, le concept poupée russe et cette allusion aux jeux pour bambins qui apprennent les dimensions, le plus petit à enfiler dans le plus grand.

- Le volumineux : 96 pages, c’est généreux pour du « dès 1 an ». On habitue les petits à de très minces albums, assez souvent cartonnés. Ici, c’est remarquable, la texture et l’épaisseur du papier est pareil à celui des revues de grande qualité pour adultes. Une nouvelle expérience à vivre, cette accessibilité à des matériaux comme chez les adultes.

- Les mosaïques de photos au début et à la fin: excellente idée offrant un très joli look et la possibilité d’un exercice de reconnaissance à faire avec l’enfant.

- Les sections « Le bébé », Les vêtements « La chambre », « La cuisine » pour la force et la simplicité des images offertes.

- Les pages mitoyennes qui ont un lien : à gauche de l’herbe, à droite, une sauterelle. À gauche, une fleur, à droite, sentir. À gauche, des livres, à droite, lire, etc...

J’aime moins
- La première section « LA FAMILLE ».
  • Ça commence ardu si on tient compte que nous adressons aux 1 à 6 ans. La difficulté est grande d’illustrer des liens familiaux, c’est abstrait pour un enfant de bas âge. Une page « UN COUSIN, UNE COUSINE » côtoie « UN FRÈRE, UNE SOEUR » A priori, rien ne les distingue, on voit quatre enfants qui se donnent de l’affection, point. La page « MAMAN » : s'illustre par une mère assise dans l’herbe au soleil, la tête penchée, les yeux fermés à côté d’un enfant qui regarde au loin. Je comprends que l’on veuille éviter le cliché mais pas au risque d’égarer le lecteur enfant. D’ailleurs, je n’ai pas réussi à intéresser celui (3 ans) à qui j’ai présenté cette section ; seul, l’arrière-grand-mère occupant une page à elle seule a trouvé grâce à ses yeux.
- Certaines photos portant à confusion :
  • « YEUX », des doigts écrasent un « NEZ »
  • « REGARDER », un enfant regarde un globe terrestre, on voit la direction de son regard mais pas ses yeux, ses mains sont très présentes sur le globe, ce qui peut confondre l’enfant.
  • « DES AMIS » Une bande d’animaux en peluche. Je ne suis pas certaine que toutes les familles nomment les peluches « amis ». Ça m'a pris un certain temps à reconnaître les divisions, elles sont sûrement trop subtiles pour l'enfant qui feuillette les pages en désordre. Ses cousins sont donc représentés pas des êtres humains, mais ses amis, par des peluches ...
  • « JOUER AU BALLON » montre un enfant qui tient un petit ballon, page mitoyenne montre de la verdure où se niche une citrouille de semblable couleur. Très amusant pour l’adulte, confondant pour l’enfant. Je continue à croire que le but de l’imagier est de clarifier les images dans la tête d’un enfant.
Je m’interroge
Le titre « C’est à moi ! », qu’est-ce qui le justifie ? On y trouve plusieurs actions (verbes), des cousins, une arrière-grand-mère, on ne peut prétendre que tout ce qui est énuméré appartient à un enfant. Le « C’est à moi ! » ferait allusion à l’imagier lui-même ? Probable.

Pris au mot (tentant en ce qui a trait à un imagier !), ce titre de possession pourra jouer des tours aux parents. C’est tentant de goûter les belles fraises joufflues qui nous appartiennent ! Personnellement, j’aurais donné ce titre à un imagier plus résistant aux menottes enthousiastes.

Pourquoi ne pas en faire un moment privilégié de partage entre le parent et l’enfant, à présenter comme une faveur de tourner les pages ? Une initiation à respecter la beauté.

Éditions de la Bagnole : Album de photos modèles uniques – Dès 1 à 6 ans, 96 p. 21 cm x 21 cm, 19,99 $

mardi 15 mars 2011

Je voudrais qu'on m'efface - Anaïs Barbeau-Lavalette

Notre webzine La Recrue est sorti aux premières heures de ce 15 du mois. Vents salés de Joanne Rochette est sur la sellette.

De mon côté, j'ai opté pour un repêchage qui a déjà pas mal fait parlé de lui pour un premier roman. Je voudrais qu'on m'efface est en lice pour le Prix des libraires, aux côtés d'auteurs tel Louis Hamelin et sa Constellation du Lynx.

¤ ¤ ¤

Je crois judicieux d’aborder la genèse de ce récit, et pourquoi ne pas utiliser les mots mêmes de l’auteure : « Les premiers textes nés de cette rencontre (avec le quartier Hochelaga) ont servi de genèse à mon long-métrage Le Ring. Puis sont arrivés d’autres trames, d’autres enfances et Je voudrais qu’on m’efface a lentement pris forme, inspirés des battants du quartier. »
L’auteure a passé avec habileté de la réalisation au récit littéraire. Si je n’avais pas connu ses antécédents, j’aurais tout de même parlé d’un style cinématographique. Les images sont fortes, découpées, les actions menées en parallèle. Pas de croisements, ce qui intensifie la sensation du « seul sur mon île, seul dans mon bloc ». Les scènes tombent comme des couperets, et on entend presque « Moteur, on tourne » ou le « Coupé » à la fin de la scène. J’exagère, bien sûr. D’ailleurs peut-être ne devrais-je pas, car je n’aimerais pas laisser supposer que c’est trop. Ce n’est jamais trop quand c’est réussi, et indéniablement, ce l’est.
L’auteure possède un sens instinctif de la phrase sonnante et trébuchante et sa concision l’a fait ressortir. Comme si sa passion cinématographique, bien faire comprendre avec peu mais de puissantes images, lui avait inculqué cette discipline pour l’écrit.
Le sujet n’est pas drôle du tout et s’il avait été abordé avec mélo, aurait été carrément insupportable. C’est le portait de trois enfants qui l’ont à la dure, nés avec d’importants handicaps environnementaux. Kevin, âgé d’une dizaine d’années, n’est pas tant attendrissant qu’étonnant à gager toute sa vie sur les combats de boxe amateur de son père. On découvre un enfant à la violence latente. Ce serait le temps d’intervenir, mais le père, malgré un solide amour pour son fils, ne peut donner ce qu’il n’a pas. Il se bat pour sa propre survie et a autant besoin de son fils que son fils de lui.
Est-ce que parce que je suis une femme, j’ai été encore plus touchée par les deux jeunes filles. Mélissa est en charge de ses deux frères, le juge ayant interdit à sa mère, une femme de joie (!) de l’approcher à plus de 50 mètres. On comprend qu’une jeune d’à peine douze ans a besoin de quelques conseils ou de quelques dollars pour mener à bon port la barque du logement où elle vit seule, le chum ayant déserté, ce qu’elle cache à la Protection de la Jeunesse.
Ma préférée reste Roxane. Dès le départ, je me suis accrochée à sa petite flamme qui ne se laisse pas éteindre par des parents qui arrivent à vivre seulement s’ils sont ivres, ou gelés. Les coups pleuvent dans cette maison où pourtant vit une mère qui aime sa fille.
Trois parcours à suivre sur la pellicule des mots. Pas vraiment d’émotion de la part de l’auteure, comme l’annonceur de nouvelles qui relate horreurs ou catastrophes sur le ton de celui qui « rend compte de ». À nous de doser la matière émotive.
Je voudrais qu’on m’efface, Anaïs Barbeau-Lavalette, Hurtubise, 2010, 184 p.

jeudi 10 mars 2011

La petite et le vieux - Marie-Renée Lavoie

J’ai quasiment le trac de vous parler de mon coup de cœur !

Tout l’équilibre que je cherche dans un roman y est : de la tendresse, sans tomber dans le gnangnan, de l’action, sans tomber dans les montagnes russes, du message, sans la voix moralisatrice, du style, sans qu’on voit l’auteure écrire. L’histoire avant tout !

La petite, c’est Hélène, mais appelez-la Joe. Dans l’idéal le plus pur, elle aimerait s’appeler Oscar, comme l’héroïne de son émission culte. Oscar est une femme, apparaissant sous les traits d’un homme qui accomplit des exploits grâce à son stoïcisme. Ce modèle de courage stimule au dépassement sa vie d’enfant de 8 ans, qui s’en donne 10. Son idole lui donne des ailes, pas pour survoler, pour vivre son quotidien de plein fouet. Une vie de petite soldate du quotidien. Quel courage elle a de se lever en fin de nuit pour aller distribuer les journaux, et à 12 ans (donc 10), à servir dans une salle de bingo jusqu’à 22 h, tout en se levant pour l’école le lendemain. On est loin de l’enfant roi, ou reine ! Elles sont quatre soeurs à être élevées par une mère qui, à l’heure actuelle, se ferait traiter de marâtre. Et un père professeur qui gère sa mélancolie en la noyant, mais en ne dérangeant personne. Ou à peine.

La force de ce roman est la narration. J’essaie encore de comprendre comment Marie-Renée Lavoie est arrivée à passer avec autant de naturel de la narration à voix adulte en nous ramenant sans cesse dans la tête d’Hélène. Et dans son corps, car elle bouge beaucoup ! Hélène inspirée de son glorieux modèle se distingue de ses sœurs, surtout de l’aînée son antagonisme avec son scepticisme bien ancrée. Ses sœurs plus petites, elle les aime et en prend soin. Elle a à cœur d’aider, de surmonter les difficultés et son caractère. Y arriver comme son idole ! Mais pas miraculeusement, avec des difficultés réalistes et crédibles, entraves qu’elle nous transmet sans ambages, avec le charme de la vitalité vivifiante des enfants.

Et le vieux, lui ? Eh bien, on est face à de grandes affinités avec Joe qui commence sa vie et Roger qui la termine. Ce vieil homme bourru et ivrogne parait désabusé mais il ne l’est pas tant que ça. Plus ces deux là s’aiment, plus ils se chamaillent. Et plus ils se protègent en cachette un de l’autre. La fierté est l’émotion intime qui les unit. La relation sort des clichés. Ne vous attendez surtout pas à la mignonne petite qui obéit et le vieux gâteux qui flattent l’égo pour plaire.

Le personnage du vieux est très typé avec des traits rigolos par ses excès de langage et autres. Il est foncièrement intéressant à cause de la petite, pas l’inverse. Comme les parents de Joe d’ailleurs. La petite fille les observe, les comprend, veut et peut les aider. On se plait à rêver que ça existe des enfants comme ça. Et pourquoi pas ? L’art de cette auteure est de nous rendre la chose complètement plausible. C’est ça le talent.

Il y avait longtemps que je n’avais pas vécu une histoire plus que la lire.

La petite et le vieux, premier roman de Marie-Renée Lavoie, 238 pages, année parution : 2010

dimanche 6 mars 2011

Vrac-à-tout

J’ai hésité entre tricoter du vrac ou me lancer dans mon billet de La petite et le vieux. Ce titre, je le dis tout de suite : un gros coup de cœur pour moi. Et j’étais dû ! On vit et on lit pour ces coups de cœur. Mais quand on y pense, si on en avait un à la suite de l’autre, y survivrait-on ?

Renouer avec la jeunesse

J’ai succombé à la tentation. Je m’offre maintenant des récréations. Pour moi, lire des albums jeunesse, ça m’évente le cerveau d’une douce brise printanière. J’en reçois de la superbe maison d’édition « La Bagnole ». C’est franchement beau ce qu’ils font. L’objet est tentant, nous démange le bout des doigts et avant même de l’ouvrir, notre esprit s’ouvre, nous sommes dans l’attitude de recevoir du beau. Et tout au long de la lecture, je l’avoue, j’ai les yeux écarquillés comme un enfant. Un enfant qui essaie d'avoir l’esprit un peu critique ...

C’est évident que pour moi de commenter du jeunesse c’est très différent de l'adulte, ne serait-ce parce que je commence à en lire pour la peine. Je n’ai donc pas beaucoup de points de comparaison. Alors j’aurai au début la critique toute en douceur, descriptive et interrogative. Ne serait-ce que parce que je ne suis pas la clientèle ciblée ! Gros point. Pour les premiers que j’ai reçus, j’avais deux enfants de trois ans à ma portée. Dieu soit loué, ça aide ! Autant que possible, je vais essayer d’y ajouter des voix enfantines. Je vais les traduire ici. Mais dans mon coin, l’enfant ne court pas les bois. Alors, je n'attendrai pas toujours et lancerai ma voix adulte et, au fil du temps, je rajouterai à mon billet la voix enfantine quand j’en attrape une ! De toutes manières, sur l’Internet, on est toujours au présent pour quelqu’un. Vous savez que je reçois encore des commentaires sur des billets écrits en 2007 ?

Promo 9e Art
Je les estime et les salue bien bas. À quatre, ils se sont donnés, depuis 1999, la même mission que la mienne mais en bande dessinée. Le 9e Art, messieurs dames !

Coulisses du repêchage
Hier, j’ai écrit un billet sur une de mes lectures. Je ne l'ai pas annoncé ici (colonne à droite). Le livre que j’ai commenté n’est pas La Recrue du mois, le premier roman sur la sellette, tout simplement parce que je n’ai pas voté pour lui ce mois-ci. Bien sûr, je ne vous dévoilerai pas le nom de notre Recrue du mois puisque c’est secret. Est-ce que les revues dévoilent tout à l’avance à leurs lecteurs ? Non. Suspense oblige. D’un geste théâtral, on retire le drap blanc devant le titre et l’auteur le 15 du mois. Par contre, je peux vous donner le titre de mon repêchage. Cela vous sera, je l’espère, un apéritif pour le 15 : Je voudrais qu'on m'efface de l’auteure Anaïs Barbeau-Lavalette, réalisatrice du film Le Ring. Un titre finaliste du Prix des libraires.

Nous avons maintenant de très beaux signets La Recrue du mois. Ils sont beaux, bien sûr qu’ils sont beaux, Marsi en a fait le design ! Sans blague, ils sont aussi de très belle qualité. Des bénévoles qui s’offrent des signets, ah vous avouerez qu'il n'y a pas grand chose à notre épreuve pour passer le mot sur nos premiers auteurs !

Aux gens (chanceux !) de Québec
Habiter la ville de Québec, j’y serais à la Librairie Pantoute, lundi le 7 mars à 19 h 00. Les auteurs finalistes du Prix des Collégiens : Michael Delisle (Tiroir no 24, Boréal), Dominique Fortier (Les Larmes de saint Laurent, Alto), Louis Hamelin (La Constellation du lynx, Boréal), Marie-Pascale Huglo (La Respiration du monde, Leméac) et David Leblanc (Mon nom est Personne, Le Quartanier) seront présents. La rencontre sera animée par Stanley Péan.
À noter que le gagnant sera annoncé le 15 avril prochain au Salon du livre de Québec.

La 101e lettre de ...
Pas de l’alphabet mais de Yann Martel à Stephan Harper. Je ne pensais pas qu’il aurait récidivé mais voilà, il termine sur un petit bouquin, incontournable bouquin « À la recherche du temps perdu ». Tout Proust !

J'ai déniché une copie de sa lettre sur le site du Libraire. Elle est absolument charmante. Savoureuse ! C’est ma meilleure parmi celles que j’ai lues ou entendues.

Pour l'amour de la lecture !
Venise

mercredi 2 mars 2011

L'édition dans tous ses ét@ts : les blogues et le livre

Je replonge dans mes souvenirs de jeudi 24 février où j’étais invitée à une « table ronde » (titre ci-dessus), à deux invités, au Salon du livre de l’Outaouais. J’étais un peu nerveuse, tout en étant convaincue que ça irait bien. De toutes manières, la nervosité peut être un moteur, je l’ai abordé ainsi. Aussitôt arrivée, j’ai rencontré l’animatrice Martine Bolduc, je me suis vite sentie en confiance, elle avait à cœur que le message passe et ça paraissait. Elle a interrogé une fan de l’écrivain Maxime Roussy, celui-ci tardant à arriver, et pour cause, en tant qu'invité d'honneur, il participait à la Cérémonie d’inauguration de ce 32e Salon .

Une fois sur scène, la comédienne que je suis a pris le relais, j’y fais confiance, elle sait comment s’exprimer à voix haute devant un public. Les leçons apprises par mon jeu de comédienne et d’improvisatrice (stages à la LNI) m’ont servies, écouter l’autre. Se mettre au diapason de ...

Maxime Roussy est le roi du blogue. Il en tient un personnel, qu’il traite de monstre qu'on doit nourrir à tous les jours. Il s’y définit en ces mots : Agoraphobe heureux, amateur de jojoba, de psychotronisme, de nains, de mascottes mais pas de dinosaures. Mon plus grand souhait : donner à mes lecteurs et lectrices leur moment de bonheur de la journée, un genre d'orgasme, mais platonique. La maxime qui guide mon existence : « Nous ne sommes que des nains géants, pour le meilleur, mais surtout pour le pire. » Ah oui, ne vous méprenez pas, tous les chats sont criminellement fous. TOUS.

Vous voyez tout de suite que nous avons affaire à un homme amusant, ce qui est devenu évident pendant l’entrevue. Et écrivain prolifique. Au cours des deux dernières années: un roman pour adulte et sept romans pour la jeunesse, ces derniers étant des blogues fictifs. L’auteur a pris un nom d’emprunt (!), Namasté, une ado de 13 ans qui blogue depuis sept tomes ! Les jeunes adorent, un gros succès en témoigne (phot0 d'une jeune fan ci-dessous).

Nous avons parlé des blogues comme outil promotionnel pour les auteurs et les conditions pour qu’un blogue dure. La personnalité et la constance sont les qualités que nous avons fait ressortir. J’ai personnellement mis l’emphase sur l’interactivité. J’ai vu tant de blogueurs qui ont abandonné rapidement leur projet en croyant qu’écrire leur journal de lecture serait une motivation suffisante en soi. L’écho à nos messages est primordial à mon avis. Recevoir des preuves tangibles d’être entendu par les lecteurs, les éditeurs, et même les écrivains. Personnellement, si j’arrive à ma quatrième année d’existence, c’est ce feedback qui m’alimente. Faut dire qu'en plus la mission que je me suis donnée est plus grande que moi. Ça garde en vie !

L’animatrice m’a demandé si je désirais être publié, je l’ai assuré que si je le suis un jour, ce sera un projet différent. Pour moi, Le Passe-mot est déjà publié puisqu’il est en ligne et lu. Et rassurez-vous, j’ai affirmé haut et fort que je n’étais pas prête à fermer les lignes. J’aurais l’impression de tuer une partie de moi qui désire continuer à vivre. Par contre, je me donne la latitude d’un jour être ailleurs. À toutes les semaines, je fais le choix de continuer, et Maxime Roussy disait de même.

Je reviens au côté promotionnel pour les écrivains, peut-être un des thèmes les plus explorés par la causerie. Les écrivains tireraient tous avantage à tenir un blogue, en autant que le plaisir y soit. Comme dans n’importe quelle démarche de vente, on voit arriver les personnes avec de gros sabots : « je vais mettre en ligne ma démarche d’auteur pour me faire de la pub ». Le lecteur n’est pas dupe, autant il voit arriver le vendeur avec son « Puis-je vous aider ? » à décoder par un « Puis-je vous vendre quelque chose ? » Il y a des écrivains qui n’auront jamais la personnalité pour tenir un blogue, on s’entend là-dessus. J’ai pensé à Marsi qui était en face de moi en le disant ! Il faut retirer beaucoup de plaisir à communiquer. Il faut s’en nourrir. Marsi a déjà un monde intérieur florissant, comme plusieurs écrivains. Il commence mais ne nourrit pas les deux sites qu'il a démarrés. Le blogue n’est donc pas une révolution mais un outil supplémentaire, facilement accessible, pour se faire entendre et, au mieux, remarquer.

J’ai eu à m’auto-analyser avant cette discussion publique et j’ai constaté que je ne parle jamais d’un livre de la même manière. Je veux dire, je laisse venir le ton et l’humeur qui sont étroitement liés au livre dont je parle. Je ne me vois pas de formule, de méthode même. J’ose croire que ça donne un côté vivant. Mais à chacun son style, sa personnalité ! Un blogue, ne nous leurrons pas, c’est le reflet d’une personnalité, pour l'intérêt, ça dépend de ce qu’on a à dire.

Crédit des photos : Marc Simard mieux connu sous Marsi !