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vendredi 7 août 2015

Apprivoiser l’effroi de vivre : Les Correspondances d'Eastman

Caroline Allard & G.Pettersen
À mon avis, il y a que Tristan Malavoy pour surmonter ce thème aux allures mélodramatiques pour aller cueillir les confidences de trois auteures, somme toute, assez réservées.

J’ai trouvé un trait commun à ces trois gentes dames : elles sont « mortes de peur » mais s’emploient habilement, et laborieusement, à ce que rien n’y paraisse. J’en ai conclu qu’elles sont courageuses. C’est connu, le courage n’est pas d’éprouver des peurs mais de les affronter. Quelle belle démonstration elles nous en ont donnée ! Et bien plus, elles donnent le goût d’écrire pour tout le bien que ça semble leur faire. D’une manière ou d’une autre, il en ressort qu’elles se libèrent de leurs peurs en écrivant.

La première question fut pour Geneviève Pettersen (Madame Chose, La déesse des mouches à feu). Sa réaction prévisible sous un tel thème « Ah, c’est moi qui commence … » sur le ton inquiet d’une personne sur le bord d’un précipice. Après ce réflexe empreint d’effroi, elle répond d’un ton ferme et assuré. Plus rien n’y parait. En quoi l’écriture permet de dompter ses peurs ? De sa réponse, le mot « peur » rebondit d’une phrase à l’autre, elle a certainement peur de tout, mais cela ne semble pas l’empêcher d’oser, et j’arrive à me demander si ce n’est pas le contraire. Même chose pour Caroline Allard qui se libère de sa culpabilité en écrivant. Si l’on rit des tares ou des torts qu’elle expose sous forme de blagues, elle est absoute. Et même, ce faisant, si on n’en rit pas, juste le fait qu’un personnage le porte à sa place, la soulage d’un poids.

Pour revenir à « Madame Chose », celle-ci fait une scission nette entre la chroniqueuse et la romancière. Au niveau de la chronique, elle pense à ses lecteurs pendant qu’elle écrit, elle les jauge, elle se doute de la phrase qui va créer du remous. Comme romancière, elle n’y pense plus, elle se retire dans ses champs intérieurs. Elle tient mordicus à deux éléments : conserver le naturel de la langue et planter l’action dans un environnement qu’elle connait. Dans son premier roman, l’action est au Saguenay, d’où elle vient. Elle a eu peur, particulièrement du premier lecteur, son conjoint qui est lui-même auteur. J’ai trouvé frappant qu’elle parle de son héroïne ado, Catherine avec une grande familiarité, comme d’une grande amie.

Gauche G. Petterson - Droite C.Legendre
Nous avons eu de nouveau droit à la question à mille piastres : comment faire pour que le texte « témoin de vécu » se transforme en une œuvre esthétique. Je ne me souviens pas qui a risqué que c’est le même principe que de la traduction.

Claire Legendre, cette auteure française déménagée au Québec depuis quelques années est professeur de création littéraire à l'Université de Montréal. Malavoy a parlé d’une commande pour « Le nénuphar et l’araignée », elle préfère le mot invitation, puisque les éditions Les Allusifs lui ont donné page blanche pour parler de ses peurs. C'est un essai autobiographique, endosse le mot autofiction sans peur, ni reproche car elle admire Serge Dabrowski, le précurseur de l’autofiction (elle a donné un petit cours sur lui mais je ne m’en souviens plus). Elle a aussi déclaré que l’hypocondrie se règle quand une « vraie » maladie survient, et semblerait que ce soit son cas. On laisse entendre qu’elle a dû être opérer d’une masse maligne, Le nénuphar et l’araignée l’aborde, mais pas de front.

Caroline Allard nous a parlé de son quotidien qu’elle a tendance à romancer. Autrement dit, un statut facebook peut être de la pure fiction, elle transforme son entourage en personnages, tellement que sa cadette est devenue l’héroïne des Chroniques d’une fille indigne. Elle avait la fille idéale pour en faire un personnage de roman, une fantasque. Sa fille ainée, non. Autodérision rime bien avec autofiction, particulièrement pour Caroline Allard. À la période de questions, une dame lui a demandé où elle avait trouvé l’inspiration « Pour en finir avec le sexe » ; sur un ton incrédule, elle a demandé "Tout ne vient pas de vous?" Aussi rose qu’une rose aux cheveux blonds, Caroline a répondu « Oui, tout ça vient de moi » et elle a expliqué ses motivations en parlant de la position 69 qui la hérissait.
Pas besoin de vous dire qu’au kiosque Archambault, à la sortie du Café, j’ai vu plusieurs personnes feuilleter l’album. En passant, vous ne serez pas déçus si vous osez acheter cet album osé ! Malavoy a également fait remarquer que son roman Universel Coiffure était d’un autre registre, aux allures très disjonctés.

J’ai énormément apprécié ce Café avec trio d'auteures sous le mode intime, blogueuses et courageuses. Difficile d’en rendre la saveur, surtout sans appareil photo*, ni carnet de notes ! Cela n’arrivera plus, je les avais aujourd’hui et les aurais demain.

***Photos prises avant la séance de dédicaces après la tenue du Café littéraire

2 commentaires:

anne des ocreries a dit...

Quel bon moment tu as dû passer ! j'aurais adoré ce café littéraire !

Claude Lamarche a dit...

Ah!heureusement que tu es là pour nous raconter. Ça me fait ,oins de peine de ne pas y assister. Merci.