Vous savez combien je suis curieuse des choix du Prix des libraires, c’est la principale raison qui m’a poussé à lire ce premier roman.
« Un petit être impossible tapi dans l’ombre observe la vie d’un Manoir ». Avec cette phrase, le roman est à découvert. Si je la décortique :
Impossible est le mot juste, cet être ne se peut pas, rien de tel n’existe sur cette Terre, à ce que je sache.
Tapi dans l’ombre : pour le lecteur aussi. Vous ne le verrez pas.
Observe la vie d’un Manoir : Si la vie dans un Manoir vous intéresse, vous serez servi ; serviteurs, visiteurs, directeurs, femmes de chambre, cuisinier, horaire, décor de la cave au grenier.
Pour pénétrer l’antre de ce Manoir, suivez le petit être impossible, vous verrez tout par le prisme de son regard et surtout vous entendrez tout de sa bouche. « Mais en arrivant devant le gros frigo qui s’appelle aussi la chambre froide et qui est très verrouillé avec un cadenas, on voit avec nos doigts qu’on n’a pas les clefs dans mes poches et qu’on les a laissées dans mon trou et qu’on ne pourra pas manger des endives si on ne va pas les chercher ». Comme vous voyez, fait assez inusité, le récit est au « on » mixé avec du je. Je m’y suis habituée et ce choix a la qualité d'amplifier l'effet d'étrangeté.
Au départ, j’étais intriguée, bien sûr qu’un être d’une telle originalité, c’est mystérieux. Et puis, je me suis lassée, puis exaspérée, puis j'ai terminé à bout de nerfs. Ce petit être impossible s’avère une véritable peste, s’amusant à pisser dans la bouffe, se trémoussant de plaisir devant des scènes de chute. Aussi original soit-il, ce que je reproche à ce monologue que je sentais faussement maladroit est la répétition des mêmes mots (jusqu’à 3 fois le mot casse ou vigilance en 2 pages). Si on tombe sous le charme de cet être, lui prêtant des qualités enfantines, tout va, mais sinon, il devient difficile d'apprécier, puisque c'est un tête-à-tête. Son langage s’apparente à celui d’un enfant par la forme, le fond, lui, pose un regard social assez cru. Personnellement, j’ai beaucoup de difficulté avec la fausse candeur, tellement que je peux rater des occasions de rire. Je crois que ceux qui ont aimé ce roman l’ont trouvé drôle. Pas moi.
En plus, les fins sont faciles, et le moins que l’on puisse dire, sans subtilité. Difficile de révéler pourquoi sans trop en dire, et quand je mets "fin" au pluriel c’est parce que jusqu’à la fin, j’ai espéré que l’auteur en dévoilerait plus sur cet être qui est petit, se faufile partout, pense, parle, a un estomac, un nombril, des jambes, des désirs sexuels, des émotions, mais aucune conscience. Mais qui est-il, d’où vient-il ?
On revient au point de départ : un être impossible.
Je dois vous avouer que je me suis demandé à quelques reprises jusqu’où peut mener le désir d’être original d’un auteur et jusqu’où peut mener la curiosité d’une lectrice.
Vu d'ici tout est petit, Nicolas Chalifour - Héliotrope - Finaliste du Prix des libraires.
14 commentaires:
C'est drôle, ce livre m'attire et me rebute... Je ne sais toujours pas si j'ai envie de le lire... Ça semble original, le sujet pourrait m'intéresser, mais les extraits que j'ai lu ne m'attirent pas beaucoup... Alors, je le lis ou je ne le lis pas? Telle est la question...
Moi, cette narration déroutante me semble bien intéressante! C'est vrai qu'à la longue, c'est peut-être une autre histoire?!? Mais le thème m'intéresse aussi: j'ai toujours été fasciné par la vie de manoir, les tonnes d'employés qui s'affairent pour le bon confort de la famille aisée... J'aimais beaucoup la série britannique «Maîtres et valets», quand j'étais tout jeune.
Je ne sais si je vais lire ce roman, mais il est sur la liste des livres qui me titillent... grâce à toi, Venise!
Donc, pas de chance pour le Prix des libraires ?
Allie : Que je te comprends d'être embêtée. Avant qu'il soit sélectionné par le Pris des libraires, j'avais ce tiraillement, une voix qui dit non, l'autre qui dit oui. La "oui" est celle qui aime la création audacieuse, admire ceux qui osent sortir des sentiers battus, ceux qui prennent des risques. Je me permets l'aventure en lecture. Le non est bien sûr le risque, car souvent à ce moment-là, tu aimes ou pas du tout. Il y a rarement de commune mesure. Ce qui m'a décidé, je l'ai dit et le répète, la curiosité, voir qu'est-ce qui attire les Libraires et en même temps une confiance en leur goût.
PG Luneau : Tu peux tout simplement t'essayer, ce roman est à la portée de ta main ;-) C'est vrai que ça pourrait te plaire, mais disons que je n'en mettrais pas ma main au feu. J'en ai trop besoin !
C'est le fun de te voir ici, c'est toujours plaisant, mais particulièrement aujourd'hui :-)
Non, Réjean pas de chance. Je me disais déjà qu'il n'avait pas de chance AVANT de le lire (L'Énigme du retour ou Maleficium gagnerait bien avant), imaginez maintenant !
J'hésite encore à le lire malgré qu'il m'attire tout de même. Comme je suis, je crois que la balance va pencher plus vers une future lecture.
Le danger de trop vouloir en faire, peut-être ...
Intrigant ... Mais je ne suis pas sûre d'avoir envie de le lire .. pour l'instant en tous les cas !
Ca m'intrigue, tout de même... mais bon, ça ne sera certainement pas pour tout de suite. J'aime les narrations particulières... mais comme Allie, les extraits m'ont plutôt rebutée. Un peut-être donc.
J'imagine Suzanne que l'occasion fera le larron !
Karuna : Trop faire dans un sens qui m'a moins plu que plus ! Mais en n'oubliant pas que ce "trop faire" a plu à plusieurs. (juré, je ne dis plus le mot plu pour un petit bout ...)
Ah qui sait, Kikine si une autre personne te le conseille fortement. Il y a moyen de se laisser tenter par ce genre de roman qui plait beaucoup ou pas du tout.
Karine : Le moins que l'on puisse dire est que ce roman est intriguant. Bien évidemment que suivant ton blogue, je saurais tout de suite si tu t'es laissé tenter.
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