Faites comme chez vous

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c'est recevant !

samedi 29 mai 2010

Vol et survol ... des blogues

Je me permets un intermède qui prend des allures de récréation avec tout le travail que j’ai à abattre ces quelques jours derniers. C’est que, parfois, pour m’aérer les méninges qui se coincent, je me promène sur les blogues. Et bien sûr que j’y fais des trouvailles que j’appelle des trésors de l’instant. Mon impulsion de partage étant trop forte ce soir, j’arrête tout pour vous les offrir en direct.

À commencer par ce trésor d'un enfant, parce que ceux qui ne sont pas sur facebook ne savent pas combien je suis férue de ces perles qui roulent des lèvres brillantes des enfants. Je viens juste de la relever du carnet littéraire d’Andrée Poulin. Je lui ai immédiatement dit que je lui volais cette anecdote sur le champ :
Voici la scène: une classe de première année où je viens de terminer une animation d'auteure. Voici le héros: un jeune garçon très blond, qui m’arrive à peine à la taille.
Le petit blond s’avance et examine mes livres étalés sur le rebord du tableau vert.
- As-tu écris tous ces livres là? demande le blondinet.
À son ton, je n’arrive pas à savoir s'il est horrifié ou émerveillé.
- Oui, que je réponds, incertaine.
Et le petit blond de me demander, d’un air impressionné :
- Les as-tu tous lus ?
Savoureux n’est-ce pas ? Et l’auteur de ces lignes d’intituler son billet « Est-ce que l’auteur lit ce qu’il écrit ? »

Et comme si c’était tout ! Un autre vol à clic armé pour cette citation sur le blogue La librairie Vaugeois, et mûrie par Dominique Fortier de son dernier récent opus Les larmes de St-Laurent. C’est une chanson pour l’oreille mais surtout une réflexion. Une réflexion sur le temps, poétiquement légère réfléchie sur l’eau de la vie.
Écoutez ...
«Une théorie veut que tout ce qui vit et a un coeur dispose du même nombre de battements avant la mort - tant pour la souris et tant pour l'éléphant -, qu'une fois la réserve épuisée, l'être s'éteint. Cela signifierait, sans doute, que la vie de la grenouille, de l'oiseau-mouche ou de la fourmi n'est pas véritablement plus courte que celle de l'homme ou de la baleine, mais qu'elle se déroule à un rythme différent, propre à chaque espèce. Une vie serait toujours longue d'une vie; simplement, comme il est des planètes où le jour dure des mois et d'autres où le soleil se lève et se couche toutes les quelques heures, certaines créatures éphémères compriment en une journée ce que d'autres mettront un siècle à vivre.»
À chaque semaine, il y aura une citation à l’ordre de ce carnet littéraire, aussi intéressant que régulièrement à mis à jour. Je vous laisserai vous pencher pour les cueillir à l’avenir ... juste à côté dans le champ de ma liste de blogues.

Le troisième est un vol de libellules tiré d'un blogue que j’aime d’amour pour sa poésie simple et ses états d’humeurs humains. En toute simplicité chez Line Rouge. Imaginez, c'est elle la mère magicienne qui a fait naître ces trois libellules avec son pinceau trempé dans l’aquarelle. J’y sens, avec mon deuxième nez, de l’intemporel. Accompagné d'un haïkus, toujours aussi joli :
Canicule d'été
au milieu du mois de mai
prendre des vacances


Parlant images, je me suis jointe récemment au blogue Défifoto, histoire de me faire aérer l’humilité. Un blogue collectif où l'on envoie une photo à chaque premier du mois, toutes inspirées du même thème (ce mois-ci : ombre). On y retrouve des ferrés, des passionnés, des expérimentés. Alors, moi, simple amatrice à ses premiers balbutiements, une "pousseuse" de bouton automatique, que vais-je y faire ? Prendre ma nécessaire dose d'admiration parce que dans la vie, le plus est important est la participation sans prétention et avec passion.

Et là, je retourne travailler ...
(finalement, je n’ai pas eu le temps d’envoyer ce billet, il restait les liens, le titre, les images à rajouter, alors ce matin, ça y est !)

mardi 25 mai 2010

Mieux me connaître

Je reçois de temps en temps de telles demandes
"Je m’appelle Lucie et je suis étudiante en master 2 médiation culturelle. Je fais un mémoire sur la lecture sur internet, et dans ce cadre j’aimerai vous poser quelques petites questions (en pj). Si vous vouliez bien y répondre, je vous serai très reconnaissante ! Les réponses resteront anonymes".
Je l’ai reçu le 11 avril et j’ai pris le temps d’y répondre le 16, en profitant pour poser quelques questions : À quelle université étudiez-vous ? Comment avez-vous trouvé le Passe-Mot (si c'est le Passe-Mot qui vous a mené à moi !) ? Quelle a été votre première impression du Passe-Mot de Venise ? Combien de blogues avez-vous contactés ? Quel pourcentage a accepté de vous répondre ?

Je n'ai jamais reçu de réponses, même pas eu le droit à un « Merci » pour les réponses à ce questionnaire (vous le verrez !) pour le moins élaboré. Alors, j’ai décidé de vous l’offrir !
VOUS
1. Pouvez-vous vous présenter brièvement ? (sexe, âge, ville, diplôme, profession)

Venise Landry, mère de 56 ans qui a 2 garçons. J’habite Eastman depuis 5 ans, le village des Correspondances. Je suis originaire de Montréal. J’ai exercé plusieurs métiers : coordonnatrice, "relationniste", réceptionniste, téléphoniste, service à la clientèle, et pour la plupart des mandats dans de modestes organismes culturels ou communautaires. Membre de l’Union des artistes, je suis aussi comédienne. J’assiste mon conjoint dans sa carrière d’auteur, illustrateur et bédéiste.

2. Depuis combien de temps tenez-vous un blog de lecture ? Au magazine Voir, ça fait 5 ans que je tiens un blogue, tandis qu’au Passe-Mot de Venise, carnet de littérature québécoise, ça fera 3 ans dans quelques jours à la journée mondiale du livre, le 23 avril. Pendant les 6 premiers mois, c’était le blogue officiel des Correspondances d’Eastman. Il devait être tenu par plusieurs rédacteurs mais personne n’est venu me rejoindre et ma plume a couru en solitaire. Comme Les Correspondances d’Eastman n’est (malheureusement !) pas actif toute l’année, on pensait fermer le blogue. J’ai eu peur que les efforts investis se perdent et qu’à chaque année on doive repartir à zéro. On m’a alors chaleureusement encouragé à faire cavalier seul. Je ne l’ai pas regretté puisque de toutes manières, je couvre les Correspondances d’Eastman dans son avant, pendant et après. Je tiens à préciser que Le Passe-mot de Venise s’est ensuite donné la mission de couvrir la littérature québécoise. Je fais aussi partie du blogue collectif de maintenant onze rédacteurs, La Recrue du mois, une vitrine pour les auteurs québécois qui en sont à leurs premières œuvres.

3. Quelle est votre fréquence de publication (par semaine) ? Auparavant, je publiais un billet au deux jours et maintenant, je tente d'y arriver au trois jours !

VOTRE RAPPORT A LA LECTURE
4. Avez-vous toujours aimé lire ? Oui, toujours. Quel est votre rapport à la lecture ? Je tourne les pages de mon imaginaire en même temps que les pages du roman ! Mon cinéma intérieur entre en activité. C’est un tête-à-tête intime de moi à une autre personne. Ça calme un peu mon immense appétit des mots, pour la foi que j’ai en eux, que des phrases clairement émises débroussaillent la pensée, la stimulent jusqu’à la faire surgir. Sans les mots qui se forment dans une tête, est-ce que la pensée existerait ? Les mots sont le véhicule de notre monde intérieur. Je rajouterais que les mots écrits pèsent plus lourds que les mots à l’oral.

5. Combien de livres lisez-vous par mois ? 6 à 7 livres.

6. Avez-vous participé à un forum de lecture auparavant, ou à toute autre activité littéraire ? J’ai participé à plusieurs ateliers d’écriture collective avec un dramaturge. J’ai pris des cours de scénariste, de recherchiste à l’école Parlimage. Encore récemment, j’ai pris un stage d’écriture avec le romancier de polar, André Jacques. Et j’ai aussi fait partie d’un club de lecture classique pendant environ un an.

7. Qu’est-ce qui vous a donné envie de créer un blog littéraire ? Le Passe-Mot de Venise est une demande qui est venue de l’extérieur (cf. question 2) mais pour le blogue au magazine Voir, le ressort intérieur qui m’a fait plonger est ma participation et celle de mon mari à un concours de nouvelles. Les 100 textes finalistes dans 5 catégories (général, humour, érotique, polar, essai) ont été mis en ligne afin que les lecteurs du Voir les commentent, le texte de mon mari y était. J’ai commenté les 100, à raison de 1 à 2 par jour pour arriver dans les délais. C’était la première fois de ma vie que je faisais cet exercice, et je recevais des « feedback » d’une part de l’équipe Voir, sous forme de points, et d'une autre autre part, des lecteurs qui votaient pour les meilleurs commentaires de lecture. Cet exercice m’a guidée et m'a permis de m'améliorer. C'est pendant ce cheminement que j’ai développé la passion de m’y adonner.

LA BLOGOSPHERE LITTÉRAIRE
8. Que pensez-vous de la blogosphère littéraire ? C’est un club de lecture à hauteur planétaire ! La lecture n’est plus une activité en solitaire, on s’encourage, se consulte, se conseille, et j’ose croire que les écrivains savent plus ce que l’on pense de leur oeuvre. Ils ne reçoivent plus seulement les échos d’intellectuels croyant qu’ils possèdent LA vérité.

9. Quels sont vos rapports avec les autres membres ? On se fréquente assidûment, c’est joyeux, c’est plus que respectueux, c’est chaleureux. On y fait preuve de courtoisie. Il arrive qu’on laisse un bref message seulement pour dire qu’on est là, pour éviter que le blogueur-euse pense qu’il ou qu’elle parle dans le néant cybernétique ! Et comme dans la vie, on choisit nos amis par affinités, même chose dans la blogosphère littéraire !

10. Les avez-vous déjà rencontrés ? Si oui, combien de fois et à quelle(s) occasion(s) ? Nous aimons bien se voir le bout du nez et s’amuser : rencontres dans les Salons du livre, piques-niques ou sorties au resto, ou participation aux Correspondances d’Eastman ! Pour ce qui est de La Recrue (blogue littéraire collectif), nous avons des réunions environ deux fois par année, en plus d’innombrables échanges de courriels dans le courant de l’année. Des amitiés se créent.

REMARQUES
11. Souhaitez-vous ajouter quelque chose ? Avez-vous des remarques ou réflexions ? J’aimerais rajouter que si j’ai choisi d’uniquement fouiller la littérature québécoise au Passe-Mot, c’est par conviction que nos écrivains ont extrêmement besoin que l’on découvre la valeur de leur œuvre. J’en ai été convaincue plus que jamais en apprenant qu’en général un roman (pas les quelques exceptions) considéré comme un succès au Québec est vendu à 500 exemplaires !!! Si j’arrive de temps en temps à faire disparaître quelques préjugés autour de notre littérature, je suis contente. Je trouve essentiel qu’on « se » lise. Si on se donne la peine de consommer des T-Shirt fait au Québec, il devrait en être de même pour notre culture. Surtout pour notre culture !!

Et si vous permettez, je terminerai ainsi : autant les lecteurs sont précieux pour un écrivain, autant ils le sont pour un blogueur :-) ...

dimanche 23 mai 2010

Par ici et par là

Chronique au « je »
C’est dimanche par ici ... et par chez vous ? Tout le monde est dehors (quand il n’y a pas de hockey), on délaisse les écrans et on regarde la vie directement dans les yeux. Moi de même. Aujourd’hui, direction Montréal ; librairie Monet ! Eh oui, je reste bien plantée dans le milieu du livre ! Aujourd’hui, jour BD, pendant que le rabais cours, pour la dernière journée, si je ne m’abuse. Attention, ça vaut la peine 30% de réduction si vous en achetez une douzaine et plus. Nous, on se met à trois, aucun règlement ne le défend (on démêle les $ après) !

J’ai terminé hier un roman que je n’ai même pas eu le temps d’annoncer « Pleurer comme dans les films ». Un beau titre. Critique à venir, j’essaie de démêler mes impressions et ce n’est pas évident. Auteur d'un premier roman (déjà écrit un recueil de nouvelles) : Guillaume Corbeil.

En attendant, quant à être derrière votre écran, pourquoi ne pas prendre connaissance de ceci :

Prix mérité (à mon avis !!)
Maleficium de Martine Desjardins (Alto) a échappé le Prix des libraires du Québec plus tôt ce mois-ci. Il s’est cependant rattrapé le week-end dernier, lors du congrès Boréal tenu à Québec, en mettant la main sur le prix Jacques-Brossard de la science-fiction et du fantastique. Le prix, doté d’une bourse de 2500$, récompense la meilleure production de ce genre paru en 2009.

Librairie philanthropique (j'adore cette initiative)
Nous avons décidé de faire notre part en supportant des OBNL qui agissent positivement à divers niveaux. Notre support prend la forme de la vente de livres usagés. Tous les revenus de vente sont remis à des organismes.

Un autre objectif du projet est de rendre la lecture accessible à un maximum de gens. C'est pourquoi tous les livres en vente à la Librairie philanthropique sont à 1$. 1$ pour plusieurs heures de lecture, ça représente sûrement un des loisirs le plus économique ... et bénéfique. Car ceux qui lisent enrichissent leur esprit!

Ce prix très bas pour les livres vient avec une règle qui vise à minimiser la gestion de petites commandes : vous devez acheter un minimum de 10 livres. 10 livres pour 10$, pas mal, non?

J'aime beaucoup cette citation
"Un bon écrivain est son propre maître. L’essentiel est de rester attentif à ces deux points fondamentaux : la musique et le rythme. Si on n’a pas d’oreille, vaut mieux faire autre chose. Personne ne peut vous apprendre à écrire une phrase qui sonne juste".
(je vous dis de quelle bouche elle sort, demain, à moins que vous le sachiez ...)

mercredi 19 mai 2010

Dans sa bulle - Suzanne Myre

J’étais toute excitée de lire « Dans sa bulle », j’ai gardé un si bon souvenir de son dernier recueil de nouvelles (Mises à mort) pour les sarcasmes qui tombent comme des couperets, pour le condensé qui frappe. Faut dire que lorsqu’on en est à son cinquième recueil en six ans, on peut parler d’expertise.
Suzanne Myre, quand elle change de genre, elle n’y va pas à moitié et nous présente un roman de 410 pages !

Dès le départ, j’ai retrouvé et savouré son style à l'humour mordant qui se prête tellement bien à la vie dans un hôpital, je me retrouvais en terrain connu (le sarcasme !), et je m’en délectais. Mélisse est une préposée au bénéficiaire qui aime son métier malgré un œil et un jugement aiguisés. Très, très aiguisés. Son œil scanne sa réalité qu’elle nous rend avec autant d’ironie que de bonhommie (à laquelle j’ai dû m’habituer!). Cette jeune femme est indéniablement aimée des hommes ; le vieillard alerte, l’ami bizarre, l’adonis amoureux, le médecin complice, tous sont sous son charme. Les autres préposés, les malades, tous l’aiment ou l’aimerons. On parle d'un ton « vaudeville », j’oserai une manière plus moderne de le dire, un ton un peu chick litt. J’espère que le mot ne fera pas peur à ceux qui se disent allergiques, c’est le temps ou jamais de s’ouvrir et ne pas bouder son plaisir. Cette légèreté n’exclut en rien, ici, un propos nourri et intelligent.

C’est léger dans le sens qu’entre le ton dramatique et comique, l’auteure a poussé fort sur le dernier, y ajoutant l’option d’embellir les situations. On sait qu’il est rare qu’une femme se trouvant ordinaire, vivant une routine ultra ordinaire, avec indifférence ou ressentiment pour ses parents, captive à ce point tous les hommes intéressants. Pourtant, l'histoire se tient et on y croit mais ne cherchez pas de sens psychologique profond.

Un de mes thèmes préférés a été l’amour filial, justement un moteur de ce roman, et j'ai apprécié l'action dans un hôpital que l'auteure connaît bien étant elle-même préposée au bénéficiaire. Les descriptions sont savoureuses.

Pour la narration, il y a les chapitres de Mélisse où on se tient près d’elle avec le « je », et on visite les autres personnages par le « il ». C’est de plus en plus courant cette rotation entre le "je" et le "il" mais j’avoue, et je cherche encore à mettre le doigt sur ce qui m’a dérangé, que j’ai eu l’impression que la narration au « je » n’étais pas aussi stable que celle au « il ». Je m’approchais de Mélisse, ayant l’impression de la connaître, et de l’aimer, et puis, elle me revenait avec un ton qui me semblait légèrement changé, plus froid, moins entraînant à ce qu'il me semblait. En même temps que je l'écris, je me sermonne « que me voilà exigeante et pointilleuse ! »

J’avoue sincèrement avoir eu tendance à décortiquer ce roman. Peut-être parce que j’avais beaucoup d’attente, j’ai voulu absolument comprendre pourquoi je ne suis pas sortie de ma lecture emballée. J’en suis sortie amusée. Certains diront que c’est déjà beaucoup ... et ils ont bien raison !

samedi 15 mai 2010

J'écris parce que je chante mal - Daniel Rondeau

Vous êtes gâtés, vous avez huit autres avis à La Recrue (eh oui, déjà le 15 du mois !). Ne vous fiez surtout pas au mien seulement. Quand c'est une Recrue, je situe moins, en comptant que nous sommes plusieurs à le faire. Ce recueil de nouvelles où des micros côtoient des longues est captivant. J'en ai admiré l'intelligence, ne serait-ce que pour la pluralité des sens. Un condensé d'essence de mots, juste, précis, pas un n'est superflu.

Comme l’auteur tient un blogue, je m'attendais à des chroniques. J'ai eu une certaine difficulté à me situer au départ. Vous savez, cette manie que l’on a tous (ou presque tous) de vouloir situer, caser, étiqueter ... peut-être pour être sûr de bien comprendre ?

J’ai fait un premier essai de lecture à voix haute, mon conjoint était curieux. Faut dire que le titre est amusant, le livre attirant pour l’œil, tout pour plaire. Mais, après une quarantaine de pages, Marc n’embarquait pas vraiment.

J’ai abandonné ma lecture et un mois plus tard, j’ai repris du début et cette fois suis entré en contact avec l’homme qui me chantait ses maux. Il se fait mieux entendre sans voix. Ses lignes, ses textes, ses histoires prennent plusieurs sens. Ici, on ne voyage pas à sens unique. Ça donne l’occasion de jongler, échappant des idées, les relançant, les laissant tomber ou les ramassant pour rejouer. On peut glisser en surface ou plonger un peu plus profond, j’aime quand un auteur m’offre ce choix.

Des textes longs suivent des courts, des forts suivent des faibles, il m’est arrivé d’aimer les textes courts, les mots alignés sous tension, mais en général, j’ai préféré les longs. Daniel Rondeau donne le goût d’entrer dans un univers pour s’y laisser vivre un moment. Cette chose importante étant dite, j’ai réalisé qu’il y a un bon et un mauvais côté à chevaucher des hauts et des bas, on vit de l’insécurité. Cette instabilité dérange une navigation calme, ces soubresauts m'ont dérangés. J’aurais aimé m’abandonner !

Voilà pourquoi j’ai hâte que cet auteur nous écrive un roman au long souffle. En attendant, je sais ce que je vais faire ; aiguiser ma conscience pour être en mesure d’en saisir toutes les subtilités.

mercredi 12 mai 2010

Les Prix, ça fait jaser

On dirait quasiment que c’est fait pour ça, faire jaser. Ce n’est pas du tout une mauvaise chose, c’est même excellent, ça attire l’attention sur la littérature. J’y vais avec l’air du temps et je vous rapporte ce qui se dit sur le Prix de l’Association des Libraires (ALQ) qui a été décerné, comme vous le savez probablement, à l’Énigme du retour de Dany Laferrière et dans la catégorie Hors Québec à Vendetta dont l'auteur, R.J. Ellory était présent pour recevoir son Prix .

Selon les dires même de l’Association des libraires : (ALQ) "...Ces titres ont été remarqués par les libraires pour leur originalité et leur qualité littéraire. Ayant pour mission de repérer de nouveaux talents et de souligner l’accomplissement d’auteurs établis, le Prix des libraires du Québec est remis pour la dix-septième fois. Sélectionnés par un comité de sept libraires en janvier dernier, les titres finalistes ont ensuite été portés à la connaissance de l’ensemble des libraires du Québec, qui devaient élire un lauréat dans les deux catégories. Cette année, un nombre record de votes a été enregistré: 210 libraires se sont prévalus de leur droit de vote".

J’ai participé à une discussion animée et plusieurs trouvent décevant que ce soit l’Énigme du retour le gagnant, supposant que les libraires devraient se donner comme mission première de porter à l’attention une œuvre qui en aurait besoin. Vous savez combien j'ai à coeur de faire ressurgir les œuvres québécoises qui passent discrètement (pour ne pas dire distraitement !) dans la masse des médias et, pourtant, je vois difficilement comment les libraires pourraient s’empêcher de voter pour l'œuvre qu’ils ont beaucoup aimée, optant plutôt pour une œuvre qui a eu moins d’attention. Ça deviendrait laborieux, presque studieux. Le principe même d'un vote est de laisser la liberté du choix, comment envisager l’ALQ donnant comme consigne aux votants « N'oubliez pas, même si vous avez beaucoup aimé un livre, entre deux choix, essayez de prendre celui qui a eu moins d’attention ». À mon avis, ça ne se fait pas. On vote pour l’amour de ... et pas pour de la stratégie, on n’est pas en politique tout de même !

D'avoir l'assurance (je donnais 2% de chance pour Maleficium) que ça serait L’Énigme du retour le gagnant enlève de l’élan vers le concours. Quand c’est aussi prévisible, parce que le roman fait à ce point l’unanimité, pourquoi ne pas faire une mention à celui qui arrive en deuxième ? Ça serait la moindre des choses, ça nous garderait vigilant, on se demanderait qui serait le deuxième.

Je vais mettre mon idée en pratique à ma très, très petite échelle, je vous annonce que d’après moi, le deuxième serait « Je crois, j’espère, je mise sur ... Maleficium de Martine Desjardins » ! Un roman d’une telle qualité ! Je parie qu’il va sortir de nos frontières pour son sujet universel, tellement original, d’un vocabulaire à couper le souffle (il est finaliste pour le Prix France-Québec). De l’audace en veux-tu en v’là ! Pour personnes érudites, et les autres qui aiment être dépassées juste ce qu’il faut pour se garder alerte, une histoire qui transporte dans des méandres imaginaires très bien documentés ! Vraiment ... n’aurait été du titre fort de Dany Laferrière (ne lui enlevons rien, son Prix est mérité), cela aurait été Maleficium.

Bon, c'est dit !

Je passe à autre chose, mais ne vous empêchez pas d’en discuter, surtout pas, c’est faire couler de l’encre dans une mer littéraire parfois trop impassible (rien à voir avec du pétrole envahissant la mer des Caraïbes !).

Autre Prix, certains sont au courant, d’autres non : mon cher Marsi s’en est mérité un pour un travail non achevé ! Drôlement dit, mais avant que je m'explique, je commence par le commencement : Glénat/Québec a à cœur de faire connaître des auteurs québécois de bande dessinée :

Hachette Canada a le plaisir d’annoncer les résultats de son grand concours de bande dessinée dont le thème était “Partie de Pêche”. Les 6 projets primés seront publiés par Glénat Québec dans un album collectif qui sera lancé en fin d’année 2010. Les prix ont été décernés à :

• Premier prix (2000 $) : André-Philippe Côté (Franz et Sigmund)
• Deuxième prix (1500 $) : Jonathan Côté et Orbie (Pas de pêche!)
• Troisième prix (1500 $) : Philippe Girard (Le lac caché)
• Quatrième prix (1000 $) : Myriam Roy (Marine en ligne!)
• Cinquième prix (1000 $) : Zviane (Esquive)
• Sixième prix (1000 $) : Marsi (Le Brâne)

Marsi a reçu ce Prix et l'assurance que ses six planches seront publiées. Par contre, il n'en a envoyé que deux à date, et le synopsis. C'était la règle. Voilà pourquoi je dis qu'il est récompensé pour un travail non finalisé. Il doit maintenant envoyer les quatre autre planches à des dates déterminées.

Nous sommes super heureux, cela nous tient dans le bain littéraire !

lundi 10 mai 2010

La promeneuse du Cap - Louise Portal

J’ai osé commencer par le deuxième, quitte à revenir à « Cap-au-Renard », le premier. Je ne crois pas que ce fut une bonne idée. Il m’a certainement manqué son départ de vie pour m’attacher à Murielle, cette femme meurtrie d’une soixantaine d’années. La magie de la rencontre n’a pas opérée chez moi, malgré un attachement indéniable aux lieux qu’elle parcourt, contemple, observe, la fameuse côte gaspésienne.

Cette femme est à unifier son passé à son présent pour compléter une guérison déjà bien amorcée. Nous sommes conviés à la suivre dans son pèlerinage d’exploratrice d’émotions qui décollent du fond de son être, dans le but d’un jour mieux accueillir son avenir. S’infiltre du silence entre les mots, tellement il y a de recueillement dans les observations qui nous sont rendues un peu à la manière d’un journal tenu par une femme portée sur la contemplation. En tout cas, c’est furieusement tranquille ! Peut-être n’étais-je pas d’humeur à envisager une si importante quiétude d’esprit, j’y ai presque trouvé de la langueur à certains moments.

Plusieurs personnages croisent Murielle, ou ressurgissent de son passé. Par exemple, un couple très beau chez qui elle séjourne quelque temps. La relation entre les deux êtres est exquise, malgré le cancer avancé de l’un, une relation parfaitement harmonieuse. Trop parfaite peut-être ? J’ai presque l’air d’insinuer que les gens heureux n’ont pas d’histoire ...et pourtant, je ne crois pas cela.

Murielle porte en elle un passé infernal, des souvenirs tragiques. Pourtant, dès les premières lignes, au niveau émotionnel, j’ai eu la sensation que tout était déjà réglé, qu’il ne s’agissait plus que de finaliser la guérison en posant des gestes un après l’autre.

Ce récit m’est apparu comme la thérapie de Murielle rendue à la manière d’un journal intime, une conclusion détaillée du premier tome, probablement intéressant pour ceux qui ont lu (ce qui n’est pas mon cas, je le répète) et aimé Cap-au-Renard. J’ai cependant apprécié la visite de lieux que je connais bien, de reconnaître par exemple « Café Couleurs » à Barachois m’a apporté une belle émotion, d’autant plus que j’ai lu la principale partie du roman en Gaspésie. Une manière de faire une tournée de la Gaspésie, puisque Murielle s’y déplace allègrement, et sans la fatigue du voyage !

La promeneuse du Cap de Louise Portal (site officiel) - Éditions Hurtubise, 176 pages.

vendredi 7 mai 2010

Tout bouge autour de moi - Dany Laferrière

Fait assez amusant, je l’ai lu en auto durant mon aller-retour pour la Gaspésie, donc au moment où tout bouge(ait) autour de moi. J’avais hâte de lire ce récit***. J’ai accepté comme un cadeau que Dany Laferrière nous invite à l’intérieur de lui à ce moment tragique de son existence. Par contre, je trouve aberrant que ce récit soit mon entrée dans son univers écrit. J’avais « L’énigme du retour » entre les mains, j’ai cependant préféré le « pendant » à « l’avant ».

Fébrile, j'ai lu goulûment ces chroniques et comme pour tout ce qui s’avale rapidement, je me demande à cette minute quelles empreintes a laissé ce livre sur moi. J'y ai nettement vu deux parties : le « pendant », ses pieds dans la terre de Port-au-Prince, le « après », ses pieds remarchant dans une vie organisée.

La partie « Pendant »
J’ai découvert jusqu’à quel point Dany Laferrière sait démanteler les instants pour nous les passer comme des clichés qui défilent et défient nos yeux. C’est ce que je désirais ; être là. Il m’y a amené et j’en ai eu les larmes aux yeux. Non pas pour la tragédie qui bouleverse l’être mais pour la reconnaissance qu’il me prête le regard de celui qui ne court pas le sensationnalisme, de celui qui donne priorité à la vie, de celui qui fait tomber l’événement sur ses pattes. Je vois comme une chance inouïe d’avoir vécu au même moment que lui cette minute fracassée en 60 secondes longues, comme si la terre se secouait pour se casser. Ébranlée d’entendre en même temps que lui le son prolongé du silence en écho à la catastrophe. J’avais besoin du regard d'un fervent de cette terre mais à l’œil détaché, nullement ému par automatisme. Ce qui donne un regard lucide qui devant la mort s’ouvre encore plus grand à la vie.

Cet homme a su donner un rythme à son récit, découpant ses souvenirs en diapositives projetées dans un phrasée poétique qu’il boucle comme autant d’histoires en soi. Il a lâché ses impressions par petites bribes titrées qui m’apparaissaient contentes de se libérer des murs de ses méninges. Ça, je l’ai senti. J’ai reçu sa fébrilité à donner ses impressions comme le serait un photographe effrayé par la possibilité de les voir s’engouffrer dans la mémoire de l’oubli. C’est là que se voit à nu son âme de journaliste, celui qui s’aime témoin pour laisser le haut parleur exprimer la beauté du survivant qu’il était déjà avant de survire encore.


La Partie « après »
Le ton change quand il revient au pays et à son agenda. J’ai eu l'impression de tomber, j’ai dû me relever pour m’adapter, peut-être autant qu’il a dû le faire, qui sait. J’ai pensé avoir perdu le fil, j’ai eu honte un instant de mon désir qu’il reste là-bas pour que j’y demeure encore un temps.

Après une transition de quelques pages qui m’ont fait perdre la notion du temps qui file vite (en même temps que l’auto), j’ai plongé dans le cœur de sa réflexion. Je l’accompagnais de nouveau. Il avait dépassé l'étape des observations, projeté au fil d’arrivée en vivant vibrant après une course où les jambes tremblent encore et bat trop vite le cœur. Après la première étape des observations, Laferrière tire ses conclusions droit sur les cibles. Cette réflexion profonde sur le sujet complexe du peuple Haïtien m’a impressionnée. Je l’ai lue les yeux écarquillés, autant que l’esprit. On n’a pas réfléchi à moitié, pensez à l’éditorialiste amusant que peut être Dany Laferrière, et rajoutez-y l’urgence du cri.

À la lecture de ce récit, au mieux, vous apprendrez beaucoup, au pire, vous réfléchirez beaucoup, mais une chose est certaine, l'indifférence est exclue.

Tout bouge autour de moi, Récit, Dany Laferrière --- Mémoire d'encrier ---

***
Tristan Malavoy-Racine, rédacteur en chef du Voir cerne ce récit en peu de mots. Je nourris une vive admiration pour son art de la concision, sa critique complète ici.

"Dans ces textes brefs, sobres, sortes de vignettes accompagnant les images d'un drame, Dany Laferrière - que le hasard ou le destin avait convoqué sur le sol de son enfance - dit le séisme à hauteur d'homme, les bruits d'une ville en état de choc, puis les premiers miracles d'une vie qui reprend ses droits".

mardi 4 mai 2010

Miss Pissenlit - Andrée Poulin

Eh que ça tombe bien de vous entretenir de Miss Pissenlit en ces jours où pointent leurs petites têtes de soleil ! Je mets au défi quiconque de voir le pissenlit de la même façon après cette lecture. Mon chum m’offrait souvent de la salade de pissenlits et ma réticence à en manger s’approchait du dégoût. Maintenant, je suis ouverte, comme nos cousins européens, à goûter à tout ce qui est à base de pissenlit, cette plante abondante qui se mange de la racine au bourgeon.

Bon, avant que vous pensiez être tombé sur un blogue d’horticulture, je plonge dans l’histoire. Manouane, une ado de 15 ans, rejetée de son village suite à ce qu’elle appelle la « Catastrophe », pâtit à cause de la réputation de ses parents, surtout celle sa mère qui passe pour folle tellement elle veut frénétiquement convertir tous et toutes à son idolâtrie de la Vierge Marie. Entre une mère à genoux devant ses statuts et un père à genoux pour traire ses vaches, elle se révolte de la bêtise du monde entier, tout en continuant d’aider son père.

Ce n’est pas un thème nouveau mais la manière de l’aborder est originale, les personnages secondaires intéressants et, surtout, le récit vif et alerte est rigolo. J’ai apprécié l’humour tout en finesse et cette manière de nous en apprendre sans que l’aspect pédagogique soit pesant. Manouane a déversé dans ce pissenlit sous-estimé toute l’attention qu’elle ne reçoit pas. Elle le cueille, l’étudie, le défend, le soigne, mais surtout le cuisine, en biscuits ou en boutons macérés. Au cours de ce « 376 pages », il y a une étude de pissenlit poussée, intégrée avec entrain et bonne humeur.

Progressivement, Manouane se fera des amies ; Mistinguett, une étrangère qui ose ouvrir une lingerie érotique dans ce village puritain, Alex, un policier sculpteur marginal, et le Frisé, le seul ami de son âge, cet être heureux, un allié dans la guerre à l'arme "graffiti2" que Miss Pissenlit mènera à nul autre que le maire de la place !!

Je me suis laissée entraîner par l’histoire, j’y ai pris un réel plaisir malgré de minimes réserves, par exemple une certaine lassitude face au manque de nuances du caractère des parents. À mon avis, le côté trop caricatural retire à l’histoire plus qu’il n’apporte, ce qui n’est pas le cas des autres personnages poussés, mais non jusqu’à la caricature. Petit agacement, comme toujours, vis-à-vis les êtres parfaits : Le Frisé. Assez parfait pour dégager un côté paternel surprenant pour un jeune homme de cet âge attiré par une jeune fille de cet âge. Je me suis aussi demandé s’il n’y avait pas un excès de pudeur dans cette relation ; est-ce par peur que ce roman ne tombe dans les mains de plus jeunes ? Pour les ados, ils risquent de trouver la relation un peu couventine avec tout ce qu’ils vivent et entendent aujourd’hui !

Je le répète, ce sont de moindres maux, puisqu'ils ne m'ont pas empêché de m'abandonner à mon plaisir. C’est un roman à lire à partir d’une douzaine d’années, mais ne surtout pas se priver si on est un adulte. Premier roman pour adulte et ado chez Andrée Poulin qui a déjà écrit une quinzaine de livres pour enfants. Sur ce, je vous laisse en compagnie de sa Miss Pissenlit :

Si les pissenlits étaient rares, fragiles ou menacées, on les ferait pousser dans des serres chaudes. On créerait des associations de protection du pissenlit. Mais ils sont partout, alors on y accorde aucune valeur.

[...]

À Sainte-Cunégonde-du Cap-Perdu, je suis comme le pissenlit. Méconnue et méprisée. Incomprise et jugée. Mais je ne me laisserai pas pourchasser, piétiner, ravager ou détruire.


Miss Pissenlit, Andrée Poulin, Québec Amérique, 376 pages