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vendredi 2 août 2013

Si tu passes la rivière de Geneviève Damas

J’ai lu cette histoire voici bientôt deux mois et elle crépite encore dans ma tête. L’émotion est restée vive, comme si je l’avais lue hier. Je dis lue, je pourrais dire vue. Elle est facile à voir sous la plume de Geneviève Damas.

Avec le titre et la couverture, je m’attendais à une histoire tendre et calmement poétique. Oh, que j’étais loin du compte ! L’histoire est densément dramatique. S’il y a poésie, elle est contenue dans la tête candide de François.

La famille dans laquelle vit François habite creux, mais elle ne serait pas loin du village, qu’elle n’en serait pas pour autant près des gens. Sa famille est retirée du monde et a des contacts avec l’extérieur que pour vendre les cochons qu’ils élèvent. Uniquement du mâle dans cette maison depuis que la sœur ainée a traversé la rivière. Pour François, cette rivière est la frontière infranchissable – tout le danger viendrait de là - entre sa vie soumise à la férule du patriarche et la libération de son emprise. C’est aussi l’ouverture qui a happé sa sœur qu’il considérait comme sa mère.

Il est cerné par la rivière mais encore plus par la rudesse, la violence même, de trois malotrus ; son père et ses deux frères. Il règne un silence nauséabond dans cette maison, certainement plus que dans la porcherie dans laquelle le garçon travaille. François a cela de différent qu’il aime parler, et comme il n’a personne à qui confier ses pensées primaires (certains le traiteraient d’arriéré mental), il se confie à un cochon. Il en choisit un et nourrit une relation étroite avec lui. C’est tout à fait crédible et nous n’avons aucune envie de rire, je vous assure. J’y vais à pas prudents pour ne pas trop dévoiler de cette délicieuse intrigue, mais vous saurez que François trouvera une autre personne à qui parler. J’y repense, il n’y a pas de mal à le dévoiler ... c’est à un prêtre.

J’ai tout aimé de ce roman, les défauts ont fini par se confondre aux qualités, tellement j’ai pris du plaisir à entendre la voix de François. Rien n’est expliqué, tout est démontré, vu et vécu. Le lecteur a de la place pour pondre sa propre histoire sous les mots. Personnellement, j’ai même déduit qu’une relation d’amour, qu’elle soit avec un chien, un humain ou un cochon ouvre les digues de la compréhension. C’est un pied de nez à l’intelligence intellectuelle qui serait le seul passe-partout pour ouvrir la porte de la connaissance, ou conscience.

C’est le talent magique de Geneviève Damas d’avoir rendu crédible ce jeune homme peu développé, ayant grandi dans le silence et la mesquinerie, qui se réveille progressivement, la chenille devenant papillon. Tout passe par croire ou ne pas croire à cette voix candide. J’y ai cru à fond, alors à moi le plaisir de cheminer avec cet être qui nous ramène à la source, comme les enfants savent si bien le faire.

3 commentaires:

Karine:) a dit...

J'ai aussi énormément aimé. Tout.

Topinambulle a dit...

Ah ça donne envie ! Je sens que je vais aimer le petit cochon confident :) Merci Venise.

Suzanne a dit...

Lu il y a peu de temps et j'ai aussi beaucoup aimé. Devrais en jaser sous peu. Beau billet gentille dame.


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