De temps en temps, je lis un “livre blanc” de Leméac. Êtes-vous comme moi, trouvez-vous qu’à notre époque où le visuel prédomine, ces bouquins tous semblables passent inaperçus ? Cela ne m’a pas empêché de lire Denise Boucher, auteure connue pour sa pièce à succès « Les fées ont soif ». La balance de ses œuvres s’active autour de la poésie, nous avons donc en mains son premier roman, écrit à l’âge de 75 ans.
Denise Boucher nous offre un roman fortement assaisonné au « je » identifié genre « épistolaire » : pas des lettres, des courriels. J’ai fini par oublier qu’elle s’adresse à sa grande amie Brigitte, partie « ailleurs » sans dire où. Tout au long du récit, j’ai eu l’impression qu’elle me parlait à moi. J’y vois qualité remarquable pour toute l’intimité installée elle et son lecteur.
Son personnage est « âgé », et ce n’est pas juste un chiffre en l’air, de beaux cheveux blancs, et une mamy aimante, non, on parle de la vieillesse et de ses limites ; celles du corps, de l’esprit et du budget. La vieillesse jumelée à la pauvreté ne fait pas bon ménage. On dit que les gens heureux n’ont pas d’histoire eh bien, cette personne âgée a une histoire car elle se frappe à ses limites, ce qui la sort de son bonheur quotidien.
Elle vit sous le même toit que son mari, Zut, que j’ai perçu comme un fantôme, tellement la place des femmes y est plus importante. Il est pourtant très présent, mais elle accorde peu d’importance à Zut, il est une matière négligeable. Peut-être parce qu’elle lui en veut. En tout cas, ce n’est pas de l’entente, c’est plutôt du silence.
Elle nous raconte sa vie au jour le jour, et c’est tout simplement savoureux. Elle a un humour fin. Il y a des soubresauts émotifs pour la peine, cette lecture n’est pas ennuyante mais certainement relaxante. Entre les mots on voit les pas feutrés d’une personne âgée qui, même au paroxysme de l’indignation, ne fait pas beaucoup de bruit. L’âge de la turbulence est terminé et ça s’entend.
Une narratrice probablement assez près de l’auteure puisqu’elle a beaucoup de caractère, est indépendante et audacieuse. Le dernier qualificatif que l’on pourrait lui attribuer est « soumise ».
Il y a si peu de romans qui abordent les limites de la vieillesse, ne serait-ce que pour cela, le roman vaut sa place sur les tablettes de bibliothèque. Si on rajoute le ton intime à l’humour fin, il vaut l’offrande, à soi ou à l’autre.
2 commentaires:
Très tentant. Bien dit: une offrande à soi ou à l'autre.
Je suis tentée, là.
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