Je vous retourne au Salon parce que hier, je ne vous ai pas tout dit. Je n’étais pas à court de mots, mais à court de souffle. Samedi et dimanche, on entrait donc dans l’Église St-Édouard de Eastman comme dans un moulin. Un moulin à paroles !
Dans un village, à force de les croiser, on connaît des visages. Cela peut devenir troublant, dans un Salon où tout à coup, ces visages deviennent des êtres humains à part entière avec le corps et la gestuelle qui va avec. Tu te dis, il me semble que j’ai déjà vu ce visage, mais où ? Et si la personne s’adresse à toi comme à une vieille connaissance, alors là, tu es faite ! Le trouble gonfle dans ta poitrine et tu dois absolument tout faire pour que ne pas trahir ce gonflement. Tu ajustes le ton, en prend un de « entre connaissances » tout en te sentant perdre connaissance par en-dedans. Feeling vécu quelques fois hier alors vous comprenez pourquoi j’arrive fatiguée !
Bon, le quotidien maintenant. La plupart du temps, je guettais d’un œil l’achalandage et de l’autre, je tentais de m’intéresser au roman « Les déliaisons » de Martin Robitaille. Tout le monde connaît le principe du « soit qu’il y ait personne ou soit qu’il y ait attroupement. Une personne achète, l’autre achète. Une personne n’achète pas, personne n’achète ». Le principal de l’art de la vente consiste donc à savoir gérer efficacement, et lucrativement, ce trafic. J’ai constaté à quelques reprises que j’ai à parfaire cet art. Mais je me console rapidement par un « Que ferais-je sur la terre si je n’avais pas tout à parfaire ?! »
Le Salon a bien commencé, je venais à peine d’installer la marchandise essayant qu’elle ait l’air de sourire à la clientèle, d’une manière détachée, quand un homme âgé approche d’un pas décidé et demande haut et fort : C’est la table de Marc Simard ? » (en me voyant, il avait toutes les raisons d’en douter !). Oui, répondis-je d’un ton se voulant aussi ferme mais camouflant cette interrogation galopante : est-ce que Marc, mon chum, mon camouflé Marc serait maintenant connu pour ne pas dire reconnu ? « Où sont les cartes ? demande-t-il. Quelles cartes ? Marc n’a pas fait de cartes cette année. Eh bien, dit-il un peu de mauvaise humeur, à l’entrée, il y a le mot « cartes » à côté de son nom ! Ah ?
Ah (soupir)... mon chum serait encore un homme camouflé.
Qu’est-ce que l’on fait dans un Salon d’Art quand il y a peu de clients et qu’on se lasse de s’obliger à lire ? On se promène devant les tables des autres, on jette des œillades discrètes surtout à celles garnies de bijoux quand on aime les bijoux, et parfois, comme une abeille devant quelques fleurs affriolantes, on finit par butiner. Il y avait là trois talles de fleurs. J’en ai rapidement élue une, me faisant accroire que la raison étant que les profits iraient à une cause humanitaire. Je suis généreuse, ou crédule, choisissez. Je n’éprouvais cependant aucun coup de cœur. Mais l’amour est aveugle, vous allez comprendre pourquoi. En fin de journée dimanche, je retourne à ma talle de fleurs mais cette fois accompagnée de mon monarque Marc, l’encourageant à voler jusqu’à cette bonne œuvre. Et tout à coup, je LE vois. Ce pendentif aux verres chatoyants, de cette élégance joyeuse, non flamboyante, qui me va droit au cou. On s’informe de ses origines, il est en verreries de Murano. Les verres Murano … fabriqués à Venise !
Alors, à Venise il sera, et le 25 décembre se déballera.
J’ai manqué d’albums pour enfants, comme toujours d’ailleurs, et que j’aie manqué de calendriers, ça, tout le monde le sait. Mais quand en ai-je manqué, là, est une toute autre question. J’attendais une couple de calendriers apportés des mains propres de l’artiste quand le maire et la mairesse se sont présentés devant ma table. Hum … hum… pourriez-vous revenir plus tard ? , cela ne se demande pas à un maire et à une mairesse, nous avons donc bavardé. C’était très intéressant et ils sont partis avec un signet « Le Passe-Mot » … On vend ce que l’on a, n’est-ce pas ?
À d’autres moments, c’est surprenant. Une dame âgée, que je sais faire partie du Club de lecture de Eastman, approche et nous bavardons de quoi vous pensez ? On découvre que nous partageons la même récente lecture « Le travail de l’huître » de Jean Barbe. Je brûle de savoir si elle a aimé, elle commence ainsi « Au début, j’étais déçue, le personnage devient invisible, si on ne le voit pas, déclare-t-elle un peu indignée, comment vais-je m’y intéresser ? Et puis, j’ai persisté dans ma lecture et finalement j’ai beaucoup aimé ». Elle ne m’a pas vraiment expliqué pourquoi mais j’ai compris. Pour ceux qui ne comprennent pas, pourquoi j'ai compris, passez par ici.
Bon, ça y est, mon blabla sur les Salons se termine ici, j’ai une urgence, terminer Les déliaisons pour commencer « Le bon usage des étoiles ». Et je ne peux même pas compter sur une attente en ligne pour lire parce que ça me surprendrait qu’il y ait foule aux urnes !
Parce qu’en plus de geler sous la botte, ça gèle dans la tête.
7 commentaires:
J'adore ces moments magiques qui feront encore des étoiles brillantes le 25 décembre entre les deux Venise ;)
@ Béo : J'avoue que ce pendatif m'a fait craquer et j'ai donc hâte de le porter à mon cou. En plus, il était à prix très abordable : 35 $, sans taxes.
Je sais pas si t'es comme moi mais quand je m'offrais ce genre de cadeau qui filait droit dans un emballage quand même, pour attendre le jour magique; je sentais un appel comme un clin-d'oeil qui me faisait chaud au coeur.
C'est la magie de l'attente, de l'avant: du pas tout de suite maintenant qui fait perdre ces instants pourtant si précieux!
Béo : L'attente attise le désir. C'est l'apéritif avant la dégustation, le avant donnant pleine saveur au pendant.
J'ai une question pour toi Venise.
Comment fais-tu pour lire autant de livres, les achètes-tu tous? Je t'avoue que je lis beaucoup mais je n'achète pas de livre,je les emprunte à la bibliothèque. Comme les nouveautés arrivent sur les étagères après que tous le personnel l'ai lu, je dois prendre des notes pour pouvoir les lire un an après en avoir entendu parler. Je ne suis pas riche alors je suis patiente.
Line rouge
@ Line rouge : Au départ, je les achetais tous, en proportion de 80% neuf et 20% usagé. Maintenant, ça ressemble à des achats de 85 % (usagé et neuf confondus) et 15 % donné ou prêté. Comme tu vois, c'est une passion qui va jusqu'à l'achat. Elle a commencé très exactement le jour où Marc a gagné 2500 $ de certificat-cadeau chez Renaud-Bray en gagnant un concours de nouvelles. J'ai réalisé jusqu'à quel point ça me rendait heureuse d'acheter des livres. Je me suis alors promis que ça serait dorénavant prioritaire dans ma vie.
Je partage cette passion avec Marc qui peut porter des bas troués mais qui a de beaux livres ! (mon dieu, va-t-il m'en vouloir que je dévoile l'intimité de ses doigts de pied !). Comme à nos anniversaires où dans le temps des Fêtes, nous nous donnons (ou demandons !) des livres, des livres et des livres.
Quand j'achète un livre, j'éprouve de fortes émotions : de la fierté, de la joie, de l'admiration, de la hâte. La fierté me vient de la conviction que je pose un geste pour nourrir notre Culture, d'autant plus (l'as-tu remarqué ?) je n'achète que Québécois. Ça contribue à amplifier cette sensation quand je sais jusqu'à quel point les auteurs d'ici ont de la difficulté. Le jour où j'ai entendu dire par un éditeur reconnu que c'est à partir de 500 livres vendus que l'on parle de d'en rééditer un deuxième. À 1,000 livres vendus, on parle de succès ! Ça m'a frappé, vraiment. J'ai poussé ma réflexion jusque là : j'ai à coeur d'acheter les bougies, les vêtements, les aliments du terroir mais je ne fais aucune différence entre un roman d'une maison d'édition québécoise ou pas.
De son côté, Marc a présenté sa BD à une maison d'édition québécoise afin que ce soit sur une maison de chez nous que rejaillisse le succès, si succès il y a.
Et voilà qui explique aussi qu'après 6 mois d'existence, le Passe-Mot s'est concentré sur la littérature québécoise, délaissant la littérature d'ailleurs.
Je me prive, oui, je sais que je me prive d'excellentes lectures, et là est ma limite, parce que nous en avons tous, je ne lis n'y achète d'autres littératures que québécoise. J'aimerais faire quelques exceptions pour certains romans français que l'on me recommande chaudement, en les empruntant, mais à un moment donné, c'est la limite temps qui vient s'imposer entre moi et ce louable projet !
Réponse très longue, je sais, mais tu as ciblé le point qui me donne des ailes pour porter Le Passe-Mot le plus haut possible.
Merci de me répondre. C'est vrai que les auteurs d'ici en arrache, commes les illustrateurs d'ici, les acteurs, les danseuses, les musiciens et les autres artistes d'ici. Ta démarche est digne de respect et je suis maintenant sur ta liste de lecteurs abonnées pour ton blog.
Line rouge
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