Cher Marsi,
C’est tout un honneur pour moi que tu veuilles sonder mon cœur, mon âme et ma bibliothèque ** (Dans le billet Pas d'allergie à ces plumes, Marsi a laissé en commentaire qu'il aimerait poser ses questions à l'auteure Nicole Fontaine).
1 Comment qualifier ma bibliothèque ?
« Sans domicile fixe ». Et, mes livres, délinquants comme certains itinérants, provocants comme d’autres, ils se promènent au hasard de mes conversations, de mes rêves, mes rencontres.
- Avez-vous une méthode de classement ?
Ceux que j’aime, je les empile sur ma table de chevet en Tour de Pise. Ce sont ceux-là qui me tiennent éveillée. Il y a même des auteurs qui couchent avec moi pendant six mois tant je les aime. Nicolas Bouvier est de ceux-là.Je déménage les autres dans deux longues étagères de ma chambre au-dessus desquelles trône ma collection d’éléphants drolatiques; quand celle-ci déborde, je les range dans la grande bibliothèque de mon bureau, en bas, par ordre alphabétique, quand j’en ai le goût, le temps et l’énergie. Autrement, je les étale sur ma grande table, les oublie, puis quand je me cherche une excuse pour ne pas écrire, les relis comme si c’était la première fois.
2 Quel est le premier livre que vous vous souvenez vous être procuré ?
En 1950, Le Torrent. Un recueil de nouvelles qu’Anne Hébert publiait à compte d’auteur. Je n’ai jamais plus cessé de lire cette grande dame de la littérature, dont l’écriture ne cesse de m’éblouir. Anne Hébert est mon phare, elle m’accompagne dans mon écriture. D’ailleurs, depuis que je suis à Paris, j’ai fait un pèlerinage dans le quartier où elle a vécu jusqu’en 1998, je crois, depuis son appartement de la rue Pontoise où l’on peut lire une plaque la commémorant, passant par le poissonnier où elle achetait son bar, le maraîcher, ses fruits et légumes, jusqu’au libraire qui la vénérait…
3. Avez-vous un plaisir de lecture coupable ?
Cher Marsi, vous saurez que la vieille dame que je suis, ne sais plus très bien ce que peut-être un péché. Non pas que je sois vertueuse. Cela explique peut-être pourquoi les lectures libidineuses me lassent. Ma seule culpabilité est envers les autres : ceux que j’ai négligés, ceux qu’il m’arrive d’oublier, ceux qui… celles que...
4. Comment êtes-vous devenu auteur ?
En écrivant, réécrivant, en jetant tout au panier, puis en recommençant. Jusqu’à l’âge de 60 ans, je rédigeais pour les autres (discours, reportages, textes publicitaires, etc.). J’ai mis ensuite 15 ans à oser soumettre mon premier recueil de nouvelles à une maison d’édition.
5 Comment faites-vous votre recherche, s’il y a lieu ?
Ah ! Mon dieu, la recherche ! Mon recueil n’en a pas commandé, mais le roman que j’ai publié en 2007 et qui portait sur la pédophilie et la tétraplégie en a exigé énormément. J’ai trouvé passionnant d’interroger des psychiatres, thérapeutes, médecins, spécialistes, visiter des centres de traumatologie en plus évidemment de tout ce que l’on trouve sur Internet. Idem pour le roman que j’écris en ce moment et dont le personnage est un autiste.
6 Votre œuvre est-elle marquée par un thème récurrent ?
Quel que soit le thème que j’aborde, j’essaie toujours de faire en sorte que mes personnages (durs, méchants, insupportables) finissent par inspirer de la tendresse. Pour moi, la tendresse m’émeut davantage que l’amour.
7 Avez-vous des projets en cours ?
Comme je l’ai mentionné plus ce moment à un roman sur l’autisme.
8 Quel personnage de fiction aimeriez-vous rencontrer ? Que lui diriez-vous ?
Étant à Paris, j’aimerais beaucoup connaître Malte Laurids Brigge, ce jeune poète danois qui, comme Rainer Maria Rilke l’a fait à l’âge de 28 ans, vit à Paris, et qui un peu comme moi veut tout voir, tout entendre et tout éprouver. Double fantomatique de Rilke, le personnage Des Cahiers symbolise la difficulté d'écrire dans cette ville
9 Ce qui vous fait sourire ?
Les enfants. Et bien sûr, les photographes me font sourire. Autrement, le résultat est un désastre.
10 Ce qui vous préoccupe au quotidien ?
Constater combien nous ne sommes pas nés égaux. C’est injuste et je le déplore tous les jours.
11 Y a-t-il une cause qui vous tient à cœur ?
Les enfants, la paix, la planète terre.
12 Que rêviez-vous de faire, enfant ?
Enfant je voulais plus tard être ballerine, championne de ski, écrivaine, comédienne, As au tennis, la meilleure en patinage artistique, missionnaire en Afrique, épouser mon frère Jean et avoir une quinzaine d’enfants. Tout ça, dans l’ordre.
Publications de Nicole Fontaine :
Moi, j'avais pas l'habitude de naître - Recueil de nouvelles - 160 p. 2007. Éditions Hurtubise, collection Arbre
OLIVIER, ou l'inconsolable chagrin - Roman - 164 p. 2009 - Éditions Hurtubise, collection Arbre.
12 commentaires:
Et comment Marsi avait-il connu ou entendu parler de Nicole Fontaine? Réconfortant de voir que quelqu'un peut publier après 60 ans. Suivre la trace d'Anne Hébert, quelle bonne idée.
Je trouve ce billet très, très...
Merci de ce beau moment.
Merci, Nicole, pour vos réponses qui m'ont à la fois fait sourire et intéressé. Elles démontrent sans aucun doute votre amour de tout ce que la littérature apporte de vivant en nos vies. Et, de surcroît, elles montrent que vous avez du répondant.
Merci à Marsi pour l'entrevue et à Nicole Fontaine d'y avoir répondu !
Oui, du répondant et de l'humour...
J'aime beaucoup la liste des rêves d'enfance dans l'ordre!
ClaudeL : Excellente question ! Madame Fontaine habite Eastman et nous l'avons connue dans le cadre des Correspondances d'Eastman dont elle a été la présidente quelques années. Elle s'y implique toujours d'ailleurs ! Nous nous croisons souvent, elle a d'ailleurs beaucoup apprécié l'album de Marsi Miam miam fléau.
Ginette : Moi, je trouve votre commentaire très, très ...
Suzanne : Ça fait plaisir que tu l'exprimes. J'apprécie.
Ah, Marsi, que vais-je te dire ... j'ai trouvé : je t'aime !
Kikine : Nicole Fontaine a délaissé les joies de Paris pour y répondre. Elle est présentement exilée pour écrire son prochain roman.
Cette femme est pétillante, pleine de vie, si tu peux finir par venir aux Correspondances :-)), j'espère te la présenter.
helenablue : Elle a un humour intelligent, ça se voit tout de suite dans son oeil. La première fois que je l'ai vue, elle assistait à une rencontre publique avec quelques éditeurs dans le cadre des Correspondances d'Eastman, et le moins que l'on puisse dire est que j'ai été frappée par la pertinence de ses interventions, de simple spectatrice à ce moment-là. Je veux dire par simple spectatrice est qu'elle n'avait pas encore publié.
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