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lundi 11 août 2014

Le roman historique et l'épopée identitaire : Les Correspondances d'Eastman

Qu’est-ce que ça donne trois romanciers historiens à la même table ? Eh bien, des discussions vives autour de faits historiques plus que de littérature. L’animateur, Jean Barbe n’a pourtant pas lâché le morceau, ramenant la conversation à un niveau littéraire. C’est plus fort qu’eux, André Vanasse, Daniel Lessard et Micheline Lachance se racontent entre eux l’histoire.


Micheline Lachance m’a donné le goût de la lire, elle et sa passion. Cette passion l’a même poussée à aller chercher une maîtrise en histoire pour se donner de la crédibilité, à ses propres yeux si j’ai bien compris. Diplôme en poche, l’écriture romanesque fut plus ardue pour la peur de trahir l’histoire, ce qui l’a porté à tenir sa narration trop près du documentaire. Elle a dû mettre de côté ses documents et l’instinct de la romancière l’a rattrapée. Et tant mieux pour Les Filles tombées ! J’aime sa motivation noble ; donner la place qui revient aux femmes, ce que les versions officielles de l’histoire omettent trop souvent.  Cette femme a quitté un poste de rédactrice en chef à Châtelaine pour écrire Le roman de Julie Papineau, lequel a nécessité  huit années de recherche. Son premier lecteur a été sévère, il faudrait que tu te branches ;  est-ce que tu veux écrire une biographie ou un roman ! (Rendons grâce ici aux premiers lecteurs !)

André Vanasse portait le chapeau d’auteur, plus que d’éditeur, mais pas bien longtemps, puisque l’éditeur revient vite à l’assaut.  Il précise d’emblée qu’il n’était pas destiné à écrire un roman historique, c’est sa détermination à ce qu’on aborde les origines multiethniques du supposé « Québécois pure laine » qui l’y a poussée. C’est une autre personne (? Nom) qui devait l’écrire, mais celle-ci étant trop occupée, il s’est jeté à l’ouvrage. Donc, un roman historique qui avait à naître « La flûte de Rafi », suivi d’un épilogue intitulé «La question juive en Nouvelle-France». Avis aux intéressés. Fait cocasse et dont l’assistance a gentiment ri, monsieur Vanasse est un ouvreur de parenthèses. Il ne répond pas immédiatement à la question de l’animateur, mais s’étend dans une parenthèse plutôt longue mais toujours intéressante.

Daniel Lessard maintenant. Un autre journaliste qui s’empresse d’écrire du romancé, aussitôt le dossier de messager rigoureux de l’information clos. Il n’est pas un cas rare, faut-il admettre. J’ai été amusée de l’entendre parler de sa sœur, impitoyable première lectrice qui l’a renvoyé à ses devoirs, lui disant que son texte manquait d’émotion, avec un ton trop près du documentaire. La détermination que ce pan d’histoire soit partagé a donné l’énergie nécessaire à monsieur Lessard pour recommencer. Maggie devait se décliner en un seul tome, c’est l’appétit des lecteurs, refilé à celui de l’éditeur qui en a fait la saga que je connais bien (2 billets à venir ici).

Autre fait amusant, à prendre avec un grain de sucre, l'analyste politique, Michel Vastel se moquait couramment de la prose télégraphique des journalistes, ce qui a stimulé Daniel Lessard à prouver un jour que le style télégraphique est utilisé par nécessité, et non pas par incapacité. Mission accomplie !

Ce qui m’a frappée chez ces trois auteurs, et j’ose croire que cette constatation vaut pour plusieurs auteurs de romans historiques, c’est leur détermination, on pourrait jusqu'à dire obstination, pour le sujet (le fond) qui remporte sur la forme. Il est crucial pour eux que nous sachions, que soient dévoilés les replis d’histoire. L’écriture est complètement au service du sujet. Il n’a pas été difficile d’en arriver à cette conclusion, et j’ai même passé la remarque sur place ; c’est le Café littéraire où l’on a parlé le moins du geste d’écrire. Les échanges vifs ont tourné autour de questions du passé, de celles qui se répercutent sur notre présent, ce qui n’en est pas moins passionnant. 

Monsieur Lessard nous a prouvé qu’il n’est plus tenu à la neutralité du journaliste à l’emploi de Radio-Canada, faisant un parallèle entre Stephen Harper et son personnage de curé borné dans Maggie. L’entêtement, l’endoctrinement de cette droite qui tient les rênes du pouvoir, en repoussant les témoins gênants, et gèle l’information. Une sortie sentie envers le gouvernement fédéral en place et, même, il y va d’une prédiction à savoir que Harper n’est pas décollé de son trône aux prochaines élections (non, ô secours !)

Voici le genre de surprises que réserve ces Cafés littéraires. J’aime et j’aimerai ces moments d’intimité entre l’auteur et le lecteur tant et aussi longtemps que l’imprévu sera au rendez-vous.

1 commentaire:

anne des ocreries a dit...

Moi, ce genre de bouquins, ça me plaît ! Sont-ils palpitants ?