Le roman avant sa publication m’intéresse. Disons, m’intéresse aussi. En butinant sur la toile, j’ai découvert un blogue « Chroniques d’un premier roman » et à l’intérieur, une entrevue vidéo en deux parties. C’est une entrevue avec Antoine Tanguay, certains le connaissent, c’est l’éditeur des éditions Alto.
Dans la première partie du vidéo (environ 6 minutes), j’ai entendu parler du monde de l’édition en général et de Alto en particulier. J’ai appris, avec un immense plaisir d’ailleurs, que le roman que j’ai tant aimé « Les carnets de Douglas » de Christine Eddie sera publié en France. Excellente nouvelle.
Mais c’est la deuxième partie qui est venue me chercher. J’ai bu chaque mot et j’irai boire encore, car lorsque l’on écoute avec émotion, certains mots nous échappent. En tout cas, moi, je suis comme ça. C’est un 6 minutes très remplies (A.T. a un débit assez rapide !) d’informations, premièrement sur Alto et l’accueil des manuscrits, y compris une précision sur la politique éditoriale, en d’autres mots, la mission que Alto se donne, Et j’arrive enfin à ce que j’appelle le « Préroman », c’est l’exposé qui m’a le plus captivé. La construction du roman et le principal artisan, l’écrivain. Tout le travail, non technique, avant la publication. Antoine Tanguay nous entretient de son rôle de directeur littéraire, différent de celui d'éditeur, même s’il porte les deux chapeaux. Je vous invite à aller l’écouter, et même le voir, c’est intéressant à un niveau qui nous occupe tous ; le lecteur. Mais, allez-y, je n’enlèverai pas les mots de la bouche de celui qui nous les offre généreusement.
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J’enchaîne sur le lecteur celui qui, en bout de ligne, a le pouvoir d’aimer ou pas. Je reviens sur le sujet « l’abandon » parce que c'est l’exercice de ce pouvoir. Je ne pouvais passer outre, 19 personnes se sont exprimées sur le sujet (Merci, c’était réjouissant à lire !).
Il y a eu un vote majoritaire (je suis déformée ou apeurée par l’actualité) pour l’abandon plus facile du livre de la bibliothèque. Notons une différence pour le livre recommandé, l’effort de se rendre au mot fin grandit.
J’ai réalisé en cours de lecture des commentaires qu’il y a une différence à faire entre l’abandon temporaire et le permanent. L’abandon temporaire viendrait d’une incompatibilité passagère d’humeur entre l’œuvre et le lecteur. Celui-ci se dit « peut-être qu’un jour, allant même jusqu’à se demander, qu’est-ce que j’ai donc à ne pas l'aimer». J’ai trouvé ces remarques intéressantes car ma question originale visait l’abandon sans peur et sans pardon, celui qui dit, « non, ce roman n’est pas fait pour moi et ne le sera jamais ».
Il ressort que ceux qui fréquentent les Bibliothèques prennent plus de risques. Un bon point à la Bibliothèque qui fait découvrir ce que l’on ne découvrirait jamais par la librairie. De toutes manières, la Bibliothèque conduit à la libraire, car un lecteur séduit parlera de sa trouvaille aux autres qui, eux, achèteront peut-être ou donneront en cadeau.
Le commentaire le plus frappant, pour moi en tout cas, est celui complètement à contre-courant (de Laurence) qui dit faire un effort encore plus grand pour les livres empruntés à la Bibliothèque, puisque pendant qu’elle en est la propriétaire temporaire, quelqu’un s’en prive. Un altruisme à ce point m’émeut, nous ne sommes plus des individus îlots, nous sommes les proches d’une même famille « lecteurs ». Exception faite pour les livres réservés, je n’avais jamais pensé à la portée de mon geste d’emprunt de livres.
L’espoir de reprendre un livre et tout à coup l’aimer quand un jour on l’a abandonné m’émeut aussi. Ça me dit, les gens changent, c’est bon signe … pour une optimiste !
34 commentaires:
Bien d'accord: Laurence a de loin la réflexion la plus originale.
Maintenant que tu es revenue sur les résultats (nombreux et captivants) de ton billet, je souhaite livrer le fond de ma pensée. J'ai eu l'impression d'un malaise en ce qui a trait à l'emprunt en bibliothèque, un malaise dont je n'ignore pas qu'il est partagé par nombre de lecteurs avides mais peu au fait des détails de l'industrie: des lecteurs qui se sentent parfois coupables de ne pas rétribuer l'écrivain. Au cas où ce serait effectivement le cas de certains, je rappelle que nous sommes compensés depuis dix ou quinze ans par Le DPP (Droit du Prêt Public). Certes, les fonds n'augmentent jamais et les titres se multiplient, la cagnotte fond donc comme peau de chagrin, mais il reste que cette institution très civilisée existe et qu'on ne doit jamais se gêner pour écumer les bibliothèques publiques! Allez-y fort.
Je ne désespère pas un jour de réessayer Madame Bovary et Lumière d'Août...
@ Mistral : J'avais effectivement entendu parler de cette rétribution (compensation) à l'écrivain dont le livre est acheté par la Bibliothèque.
Par contre, si je comprends bien, qu'il soit emprunté 100 fois ou 1 fois, la rétribution est la même.
Il serait trop coûteux de recenser l'exacte quantité d'emprunts annuels pour chaque titre, tout le budget y passerait. On procède plutôt par échantillonnage: chaque année, cent bibliothèques canadiennes sont choisies (publiques et scolaires), avec pondération entre anglos et francos, et on regarde si les titres inscrits au programme par les auteurs sont au catalogue. Une cote sur 5 est établie (équivalant à une biblio sur cinq jusqu'à cinq sur cinq), et les sous sont versés en fonction, jusqu'à concurrence de, euh, un certain montant.
@ Mistral : C'est plus concret, merci. C'est plus encourageant qu'avant pour les auteurs mais j'imagine qu'il y a encore du chemin à faire, ne serait-ce que renflouer les coffres.
Oui, ce serait bien, et ça coûterait franchement pas très cher.
Je savais que tu avais entendu parler de ça, paske c'est moi qui t'en ai parlé l'an passé, héhé. Faut pas attendre après Péan.
Venise, je me souviens d'avoir parlé du DPP sur ce blogue. Comme dit Mistral, les fonds n'augmentent pas et j'ajouterais qu'ils ne risquent pas d'augmenter avec l'élection prochaine des conservateurs. J'ai même peur qu'il y ait des coupures. Harper, du haut de son inculture, doit sans doute penser que les écrivains roulent sur l'or, comme les artistes en général...
Vrai, Réjean, j'ai souvenir que vous en ayez parlé itou. Désolé: je ne voulais pas vous piquer votre dû.
Salutations, Mistral !
Right back to ya!
Venise, comment ça va dans la lecture de Champagne ?
@ Réjean : Quelle bonne question ! Je dois avouer avoir éclaté de rire parce que j'ai l'impression que ça fait une éternité qu'il est affiché dans mes lectures. Surtout que nous venons de parler d'abandon sur tous les tons.
Le moins que l'on puisse dire est que "notre" lecture avance à petits pas de page. Je le lis à haute voix pour Marc. C'est un texte superbe, dense, mais tellement dense, où la nature occupe une place de reine. C'est presque un cours sur les insectes, les animaux.
Je n'appelle plus ça lire mais savourer. Par contre, je n'y trouve pas beaucoup d'action, c'est presque contemplatif. Mais il y a des personnages forts qui vaguent à leurs activités autour d'un lac.
J'en ai beaucoup dit, et j'y reviendrais assez bientôt, nous en sommes quand même au deux tiers ... mais je lis aussi Enthéos et Alice court après René.
Proulx procède par petites touches, comme un peintre, pour nous livrer quelques moments du destin de ces personnages. Bien sûr, ce n'est pas un roman d'aventures. Mais il va se passer des choses, très certainement, soyez patiente et sirotez ce merveilleux Champagne...
INFLUENCE INDUE!!!
Mais vous savez, ici je parle de Sherbrooke, peut-être ailleurs aussi, ici, si la bibliothèque n'a pas le livre qu'on veut: comme par exemple: Avoir 17 ans de Mistral, c'est un de ses premiers livres je crois, on le demande et ils ont un budget pour le trouver ... A Sherbrooke c,est comme ça. Alors si vous avez cette chance, commandez tous les livres que vous voulez, c'est ça une bibliothèque municipale.
On m'a dit ça, mais je le croyais pas! Sherbrooke est vraiment cool, stie. Une ville universitaire, ça torche. Juste (!) cette mise en réseau WiFi de toute la ville! Et le fait, inusité, que vous trouviez à employer vos diplômés de littérature lorsqu'ils souhaitent enseigner!
Cela dit, dans le cas précis du bouquin que vous mentionnez, je retiendrais pas ma respiration. Il est épuisé depuis quasiment quatre lustres. Il convient aussi de mentionner qu'il s'agit d'un collectif: j'y signe un texte parmi onze. Le meilleur, d'accord, mais quand même!
:-)
Wow! Les étudiants en littérature de Sherbrooke se trouvent un emploi à leur sortie de l'université!!!!!!! Je déménage tout de suite!!! ;-)
Je reviens sur le commentaire de Venise au sujet des éditions ALTO et je souhaite poser une question à Mistral, Danaée et tous les autres écrivains qui passent par ici: pourquoi avoir changé, à un moment ou un autre de votre carrière, de maison d'édition? Qu'est-ce qui a motivé votre choix? Qu'est-ce que vous appréciez, qu'est-ce qui vous agace, de votre maison d'édition? Je pense à écrire un petit billet sur le sujet pour La Caravane, merci à Venise pour le filon au sujet d'Alto et à vos futurs commentaires... Évidemment, vous pouvez choisir de rester anonymes!
Chpense que ça aide d'avoir grandi dans le boutte...
Sorry, Laurence. Pour ta question. Sûrement tu rigoles. Même moi, j'ai des limites à ma candeur.
:-)
J'ai hâte de voir ce que Laurence va écrire sur la relation entre éditeur et écrivain. Personnellement, je ne peux pas en témoigner. Je connais le milieu mais je n'ai jamais publié. Par contre, la question m'intéresse. Par exemple, j'aimerais savoir pourquoi Lise Tremblay est passée de Leméac à Boréal. Plus récemment, Pascale Quiviger est atterrie chez Boréal, alors qu'elle avait publié ses deux premiers romans chez L'instant même. Est-ce un concours de circonstances ? Certains éditeurs, comme Boréal par exemple, courtisent-ils des auteurs «in» ?
Allons donc, c'est interdit! On appelle cela du maraudage et c'est fort mal vu!
C'est aussi le sport favori des éditeurs, mais ce n'est pas moi qui vous l'ai dit.
Héhé Mistral, non, non je fais ça en toute innocence! Et oui, je suis bien candide... ;-) Je ne veux pas écrire un billet de "bitchage", loin de là! Mais plutôt me pencher sur les fonctions de l'éditeur, leurs façons de faire actuelle, réfléchir là-dessus... les critiques, bonnes ou mauvaises, je trouve ça sain! Mais comme je t'ai dis, tous les commentaires peuvent se faire sous le couvert de l'anonymat (tu peux d'ailleurs choisir l'option "anonyme" quand tu fais un commentaire ici, et sur La Caravane aussi). Je ne veux pas non plus attirer les commentaires personnels du genre: mon éditeur est un ci ou un ça, ce n'est pas le but!! Comme je l'ai dit plus haut, je cherche à examiner un peu de quoi sont faites les relations éditeur/directeur littéraire - écrivain, quel genre d'accompagnement il peut s'établir, qu'est-ce qu'un écrivain apprécie ou pas de ce genre de relation, etc. Enfin, je vais essayer de recueillir plusieurs points de vue et écrire un petit topo là-dessus, même si ça peut sembler une entreprise risquée...
Mistral, en affirmant que les éditeurs font du maraudage, vous répondez à ma question. Merci.
Laurence, il y a un bon billet à écrire là-dessus, car je crois qu'on peut traiter très sérieusement le sujet. J'espère que vous aurez des réponses à votre appel. Je vais surveiller ça sur votre blogue.
J'aurais pourtant juré que tu savais lire, man.
Moi, je t'ai rien dit. Et ça m'a tout l'air que ça va devoir demeurer ainsi.
T'aurais fait un crisse de mauvais journalisse, Réjean! Avec toi à la place de Woodward et Bernstein, Nixon pilonnerait toujours le Cambodge et Deep Throat poireauterait dans le garage!
:-)
Oh, Laurence, il ne fait nul doute que c'est un sujet riche comme le Klondyke mi-dix-neuvième. En fait, le seul avis que je t'offrirai sera de voir plus large et plus grand. Le cadre d'un article est loin de suffire et tu en sortirais frustrée.
Par ailleurs, outre le fait que je ne suis vraiment pas doué pour l'anonymat, que l'anonymat me répugne, j'ai aussi le léger problème d'avoir une plume qui se reconnaît sans qu'il soit trop besoin de signature.
Mais si tu veux faire du sérieux, je te verrai. Je t'aiderai. Tu sais, j'en ai franchement rien à branler, du milieu: je suis assis dessus.
Mistral, je n'ai jamais aspiré à être journaliste. Je suis curieux, un point c'est tout. Merci encore pour l'information. Ça va rester entre nous. Salutations !
Right back to ya today too, old boy.
Puis-je ajouter un commentaire ? Vous en avez de la jasette aussitôt que j'ai le dos tourné ;-D !
Je me suis surprise en arrivant d'une longue escapade à lire mon blogue comme si ce n'était pas le mien !
Cedi dit, vis à vis de l'édition, je crois que nous sommes tous plus ou moins des "innocents" et ça peut être drôlement (ou pas drôle du tout) de voir de quoi il en retourne.
Je me suis toujours demandé pourquoi un écrivain changeait de maison et je me suis fait ma petite réponse : parce qu'on lui offrait plus ailleurs. Finalement, c'est une rime qui revient souvent dans notre chanson au refrain capitaliste. Quand je dis "plus", je n'entends pas seulement l'argent, malgré que ...
Hmm... l'argument économique joue sûrement dans certains cas, mais je soupçonne qu'il y a plus... et c'est ce "plus" qui me semble faire toute la différence. Quel est-il? Voilà la question qui m'intéresse. À suivre! Ah! Mistral! Si j'avais le temps, je me lancerais dans une thèse doctorale... je vais commencer par plus humble, on verra où ça mènera. Et oui, en effet, votre plume dénoncerait l'auteur aux prétentions anonyme. Moi aussi, je préfère dire les choses en pleine lumière, même si je tremble parfois un peu de mes soudains accès de hardiesse.
Oui, enfin... Vous allez devoir suer un peu pour trouver les infos qu'il vous faut. Personne ne vous parlera on-the-record, personne qui sait de quoi il parle anyway. Sauf si vous allez au-devant de quelques-uns et les apprivoisez, par écrit, en leur assurant la confidentialité. Une correspondance initiale pour établir la confiance.
Votre instinct est bon: les sous ont peu à voir, sauf exception et rendu à un certain niveau, avec ces décisions.
Allo, Venise!
S'cuse, chu patraque...
@ Mistral : Je trouve que tu as le patraque assez fringant. Je te dirai pas de prendre soin de toi, je risque trop le "matante".
:-)
OK. L'ai méritée, celle-là.
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