J'ai bien fait de suivre le conseil de Richard Séguin qui, hier, nous a conseillé la lecture-spectacle échanges épistolaires et poésie de Gaston Miron, au Théâtre de la Marjolaine, ce soir à 19 h 30.
Trois comédiens sur scène et un musicien. Robert Lalonde a principalement défendu l'échange de lettres, la comédienne Éveline Gélinas et Sébastien Ricard, comédien et chanteur du groupe Loco Locass, la voix du poète.
J'aime la poésie mais à petites doses. J'ai toujours peur de ne pas être une bonne spectatrice. De passer outre une lecture vécue de l'intérieur, de faire fi d'un être humain qui se démène devant moi pour me transmettre la beauté des mots et des émotions. Pour « La marche, le doute, l'amour », je n'aurais pas dû avoir peur. La mise en lecture de Martin Faucher est allée droit dans le mil. Juste ce qu'il faut de support musical ; il s'agissait en fait d'un fond sonore au service des mots qu'on a laissés frapper fort. Faut dire que Martin Faucher avait devant lui trois messagers mus par une intensité hors du commun.
J'ai aimé l'idée de l'échange de lettres lu avec avidité par un Robert Lalonde qui a su trouver la fluidité du poète. Une lettre a un rythme qui lui est propre et l'homme de théâtre a trouvé et suivi un filon. Il a bien senti l'homme derrière les mots, se tenant si près de son souffle que l'impression de voir Miron s'incarner dans la chair de Lalonde battait la mesure du temps.
Le grand intérêt du spectacle est que par ces lettres signées Miron, nous rencontrions l'homme dans son intimité. Par ces lettres écrites à un grand ami nommé Claude (si quelqu'un sait qui est ce Claude qu'il se lève et parle !), il s'est dévoilé impudiquement. Une lettre intéressante dévoile toujours un pan d'intimité de toutes manières. Ses émotions passaient par la colère, la lassitude, le doute mais surtout la quête et toujours la quête de sa mission ici sur terre ; pourquoi écrire, et même bien écrire et pourquoi la poésie, si c'est pour rater sa vie et ne pas être aimé d'une femme ?
Et au-dessus de ces lettres, sondant le souterrain d'un soi, se tenait vivant et vibrant, le poète grand. Le poète immense. Porté haut par la bouche de trois comédiens qui nous en ont mis plein les oreilles faisant fondre nos âmes à vue d'oeil. Une salle remplie aux deux tiers, foudroyée par cette mélopée scandée de mots qui hurlent une fureur de vivre, voilà ce que j'ai vu, de mes yeux vus.
J'en suis encore bouleversée.
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