Il est rare que je fasse appel au quatrième de couverture : "Marc S. Morris est un chasseur. À demi Mohawk, dans son sang coule une amertume brûlante nourrie de désillusion et, s’il tue les bêtes, c’est pour éviter de tuer les hommes. Pourtant, Marc S. Morris a la Foi, aimerait avoir la Foi. Devenir pape, par exemple. Ou aimer une femme. Dédier sa vie".
Suit deux autres paragraphes mais le premier suffit amplement pour me mettre en branle et, encore une fois, essayer de rendre le plus justement possible une lecture pour laquelle j’ai retirée peu de plaisir. Toujours par égard à tous ces potentiels lecteurs qui auraient un goût différent du mien. Ils peuvent être nombreux pour La foi du braconnier puisque les sujets étaient si loin de moi, à des lieux de mes intérêts. À commencer par la chasse, et par un braconnier. Pour les amateurs de chasse de gros gibiers, les descriptions sont détaillées et follement réalistes. Justes et pertinentes. Il est clair que l’auteur ne s’est pas fait raconter ces aventures et qu’il est lui-même un chasseur qui aime transcender les règles. D’ailleurs, le personnage principal porte le même prénom que l’auteur et la personne qu’il aime porte le même prénom que la femme à qui il dédie le roman.
J’ai trouvé au texte des allures de récit, un auteur racontant sa vie. Je soupçonne de l’autofiction non déclarée et je n’ai rien contre, ce n'est pas la première fois que je le dis ; j’aime l’autofiction. Mais cette fois, que s’en soit ou non, la rage sourde de l’homme qui chasse et « qui tue des bêtes pour ne pas tuer des hommes » avait de ce quelque chose que je n’avais pas le goût d’entendre. Qu’une personne soit imbibée de ressentiment jusqu’à l’os, s’il est parmi d’autres personnages, j’assume mieux le propos et peux l'apprécier. Ce que j'ai trouvé étouffant est le tête-à-tête avec ce Marc amer au point d'aiguiser son ressentiment aux lames de la haine : « Je ne veux pas de sourires étrangers ni de salutations polies. En général, je déteste les gens que je ne connais pas et je hais ceux que je finirai par connaître ».
C’est l’histoire de sa fuite, suivant les lettres « Fuck you » qu'il a tracées sur une carte géographique. Quand on se fuit, c’est souvent que l’on se cherche. Ici, l’être cherche un idéal, soit se faire pape ou sl’amour d’une femme. Il aima Emma dans l’instant où il l’a vit. Cependant, rien n’est simple avec les êtres torturés. Malgré cela, j’ai aimé l’entendre décrire son sentiment pour Emma, parce que Marc Séguin manie bien la langue, son écriture m’a plu et je m’y suis accroché pour les moments durs ou crus :
J'ai tiré sur la panse et les organes fumants. La dénivellation facilite l'écoulement du sang et la sortie des viscères. Un autre coup de couteau pour détacher le coeur, attaché au thorax par une toile, et aux poumons et au foie. Un autre coup pour le diaphragme, ou l'onglet, ainsi qu'on l'appelle quand c'est servi dans une assiette. Un dernier coup pour sectionner la trachée de l'intérieur. Tout sort. L'animal est vide. Il fume. C'est devenu une carcasse. Ça sent le sang.
Avis aux intéressés.
Pour une critique de Dominique Blondeau, vision différente de la mienne, c'est ici.
La Foi du braconnier est un premier roman pour Marc Séguin, LEMÉAC, 150 pages. Août 2009.
24 commentaires:
« Je ne veux pas de sourires étrangers ni de salutations polies. En général, je déteste les gens que je ne connais pas et je hais ceux que je finirai par connaître ».
Non merci, pas pour moi. Je passe mon tour.
Une genre de Ralph de Bricassar (The Torn Birds) déguisé en Davy Crocket !! 150 pages pour le découvrir ca peut aller. En espérant que sa Morosité soit constructive. Morose pour être Morose.Ca ne m'attire pas. Mais son écriture semble bien aiguisée.
Christian Desmeules en parlait dans le cahier du Devoir de la fin de semaine dernière. Me suis laissé tenté et j'ai passé la commande de "La foi du braconnier" à la madame de ma tabagie préférée. Je reviendrais peut-être ici y laisser un commentaire après sa lecture. Je suis certain que tu n'es pas contre. :-)
@ Suzanne : Cette phrase est dans le prologue. Je ne voudrais pas être dans la peau du personnage ou personne qui porte ce regard sur la vie. Ça doit être souffrant.
@ Pirre H.Charron : En plein ça, une écriture aiguisée. C'est un premier roman et comme les premiers, peut-être très près de lui. Avec son style bien assumé, le deuxième aura peut-être un peu plus de distance entre le propos et le "je", laissant plus d'espace pour le lecteur.
@ Gaétan : Oui, j'adorerais vraiment, j'espère que tu le feras. Je suis encore plus curieuse de recueillir d'autres avis, surtout quand j'ai de la difficulté avec le sujet.
D'ailleurs, je serai ô combien curieuse de savoir aussi qu'est-ce que Christian Desmeules en a dit pour que tu sois tentée au point de le commander.
C'est à des lieues de ma conception de la nature et des animaux... juste l'extrait que tu partages me donne mal au coeur... Vraiment pas pour moi! (Alors que va savoir, la couverture m'attirait!)
@ Allie : J'ai choisi délibérément cet extrait. C'est qu'il y en a quelques uns, l'auteur ne ménage pas ses descriptions sur l'activité de la chasse dans son sens large, et je préfère que les gens sachent à quoi s'en tenir. Et je n'ai pas pris la pire, tu sais.
Ah oui, Allie, l'illustration sur la couverture est de l'auteur. Moi aussi, je la trouve attirante. Le dessin, la couleur, le fond qui donne l'apparence d'être fripée. Surtout que, habituellement, Leméac s'en tient à des couvertures blanches.
Beaucoup trop loin de mes intérêts pour que je sois tentée... je passe, donc.
Tant de cruauté et de violence retenue dans des mots, le peu que tu nous dévoiles semble bien aiguisé oui, je ne sais pas si cela m'attire ou pas, en tout cas ça ne laisse pas indifférent, cela m'effraie un peu du concentré de cette nature...
Je passe mon tour aussi et attends l'avis de Gaétan, d'autres priorités pour le moment...
@ helenablue : Alors, on est deux à attendre l'avis de Gaétan. Mais en fait, on est deux cents à l'attendre, puisque chacune de nous vaut au moins 100. Et plus.
:-) Plus, j'en suis sûre!!
J'ai 20 ans et j'ai lu ce livre. Je dois avouer trouver sa dommage de voir les commentaires, lorsqu'il se base sur un simple extrait et dire que ce livre n'est pas pour eux. L'esprit devrait rester ouvert a tous les livres, dans le pire des cas tu auras lu un livre poche. Mais au moins, tu l'auras lu. Chaque livre apporte selon moi, quelque chose au lecteur...Je tente encore de me faire une opinion sur ce livre, je trouve dommage qu'il utilise souvent l'anglais. Mais son écriture est génial. On se fait les images tres facilement, les détails sont écrit d'une plume rempli d'assurance. Je dois avouer que j'ai envie que cette histoire soit vrai, j'ai envie de savoir qu'une personne a tracé Fuck You, sur l'amérique. Bref 7 sur 10. C'est quand meme son premier livre.
Anonyme : Très contente que vous veniez donner votre avis. Que vous l'ayez lu rajoute un point de vue, c'est important. J'ai lu ce bouquin à sa sortie et j'ai réalisé par la suite qu'il a très bien accueilli, et j'en suis contente.
Je crois que je me suis braquée un peu devant certaines parties de ce roman, ce qui m'a empêché d'en apprécier l'ensemble. Un peu comme au cinéma, s'il y a des scènes de violence ou dégueulasse, je décroche. On n'est pas parfait hein ? C'est un être humain qui écrit, c'est un être humain qui lit.
J'espère que vous reviendrez me visiter :-)
Gabrielle 19 ans
«Qui fait l’ange fait la bête»
Le meilleur et le pire. Coup de poignard qui va droit aux entrailles. Les yeux ronds emplis de la vision de la mort. La mort : si douce et si cruelle à la fois. L’homme, l’animal, quelle différence que celle du chasseur et du traqué. Les rôles peuvent s’inverser si facilement.
Roman avec une vérité non feinte qui frôle presque le cynisme.
Peut-être dérangeant, mais tellement intéressant.
Un homme en quête de sa foi qui se fuit pour se retrouver en même temps.
J'adore ...
Merci Gabrielle d'être venue donner votre opinion ici. Je suis certaine que vous allez donner l'envie à plusieurs de le lire. Votre enthousiasme est palpable.
J'imagine que vous l'avez lu dans le cadre du Prix des Collégiens ?
À la prochaine j'espère !
Fanny, Montréal
Quand on connait le travail de peintre de Marc Seguin on ne peut pas s'attendre à un roman fleur bleue. Cet artiste est cohérent avec son univers de violence, de sang et de mort. En plus, ce roman n'est pas une auto-fiction sur le travail de peintre. J'ai été soufflée par la force et la qualité de l'écriture et par la maîtrise du sujet. Qu'un peintre puisse si bien écrire ça force l'admiration. Je dis BRAVO.
Fanny : Une autre opinion très favorable pour "La foi du braconnier". Être Marc Séguin, j'en serais très flatté !
J'en profite pour mentionner à tous les admirateurs de Marc Séguin qu'il sera aux Correspondances d'Eastman de 5 à 8 août à Eastman. C'est une occasion rêvée de le rencontrer dans les Cafés littéraires.
Bonjour,
Vous êtes cordialement invité à visiter mon blog.
Description : Mon Blog(fermaton.over-blog.com), présente le développement mathématique de la conscience humaine.
La Page No-25, THÉORÈME DE L'ÂME
LES MATHÉMATIQUES DE L'INSTANT PRÉSENT.
Cordialement
Clovis Simard
Nous serons en profond désaccord sur l'appréciation de ce livre. Bien sûr, le personnage principal a une haine vicérale, sauvage, qui le rend antipathique, mais vers la fin du livre, on le sent changé, non?
Quand il souhaite vivre vieux avec Emma et attendre ses enfants sur la galerie alors que mijote de la viande dans la cuisine... Je ne retrouve pas le passage exact.
Comme je l'ai écrit dans ma critique sur mon blogue, la beauté est d'autant plus belle lorsqu'elle arrive à émerger de la laideur, comme dans ce roman.
Si ça vous intéresse de lire une opinion divergeante: http://maxxximee.skyrock.com/3029285776-Foi.html
Au plaisir!
@Maxime9232 : Ah, La Foi du braconnier, ce roman qui gagne, à ce jour, la palme de la quantité de détracteurs. Tellement de personnes m'en ont parlé avec chaleur et passion, que j'en ai même fini par douter. Je ne croyais pas si bien écrire : "Toujours par égard à tous ces potentiels lecteurs qui auraient un goût différent du mien. Ils peuvent être nombreux pour La foi du braconnier ..."
Oui, des sujets à des lieux de mes intérêts, ce qui n'enlève rien à la valeur intrinsèque du roman.
Tant mieux si tu as beaucoup aimé et je vais certainement aller lire ton commentaire.
Il faut aimer le style ... C'est très typique du Québec ce genre de roman : la quête d'identité, les États-Unis versus le Canada versus le Québec versus les premières nations ... L'homme un peu raté, confus, qui se cherche, qui est en quelque sorte désespéré de la société dans laquelle il vit... J'en ai un peu ma claque, personnellement, des romans qu'on finit de lire en ayant un point d'interrogation dans les yeux. Venez-en au fait, seigneur ! On dirait que certains auteurs québécois se la jouent un peu trop profonds et incompris; on dirait qu'ils ne sont pas capables d'en venir au fait. Suis-je la seule que ça énerve? Je ne dis pas que c'est un mauvais roman, ça non, mais un road trip de quête d'identité d'un gars qui chiale contre tout et qui ne sait jamais où il en est et bla, bla, bla... Je ne regrette pas d'avoir lu ce livre, jamais je ne regretterai d'avoir lu un livre, mais ça ne m'empêche pas de penser que j'ai perdu mon temps! Mais bon, tous les goûts sont dans la nature ! Adeptes du post-modernisme, jetez-vous sur ce roman et vous serez comblés : récit fragmenté, confus, errant, fin ambigüe, références à tout et rien, rapport au monde incertain de A à Z ... Tout y est. (Perso le post-modernisme je déteste, vous l'aurez compris.)
Cher Anonyme,
Vous n'y allez pas avec le dos de la cuillère, vos goûts sont affirmés !
Disons, que sans réagir avec autant de vigueur, je suis en partie d'accord avec vous et sachez que ça me fait du bien :-).
Peu de personnes n'ont pas apprécié ce roman, et j'en suis venue à me demander si je n'avais pas été tout simplement dans une humeur inadéquate pour l'apprécier à sa juste valeur.
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