J’ai pensé de rajouter à mes chroniques littéraires, quelques unes du milieu cinématographique. Vous me direz si ça vous intéresse. Je ne vous en farcirai pas à outrance car vous allez vite constater qu’il y a peu à dire puisque ça revient assez souvent au même. Aujourd’hui est une journée exemplaire dans le sens que, comme d’habitude, l’illogisme de l’organisation a frappé fort.
Cette nuit, à 5 h 30, départ pour St-Constant. Arrivée là-bas en catastrophe puisqu’en retard. En fait, je me suis perdue. Consolation ; je n’étais pas la seule, les indications n’étaient pas claires du tout.
La costumière, la veille, m’avait appelé me demandant d’apporter un seul costume (les figurants fournissent leurs costumes) supposant par là que les scènes seraient tournées dans un seul moment et lieu. Chose rare. Une petite voix m’a parlé fort « n’écoute pas la costumière et apporte d’autres vêtements ». Confirmant que les petites voix sont là pour parler mais pas pour être écoutées, j’appris qu'il y avait malentendu, que l'information ne s'était pas rendue et qu'il y avait aussi plusieurs scènes à l’intérieur du restaurant. Je n’avais donc pas les vêtements parfaitement adéquats pour celles-là, c'est à dire de la bonne couleur et de la bonne épaisseur ... pour l'été !
Par contre, pour le tournage à l’extérieur - passagers autour d’une gare - toujours durant une journée chaude d’été … il faut de l’imagination au cinéma ... impliquait l’ajout de combinaison sous les vêtements d’été, le manteau entre les prises. J’avais tout prévu et la costumière s’en est montrée parfaitement satisfaite.
Nous avons commencé la journée par les scènes de resto et dès la première, j’étais brûlée. Non, je n’avais pas chaud et je n’étais pas exténuée, le terme « brûlé » signifiant que l’on m’avait assez vue et qu'on ne pouvait plus décemment me placer en avant-plan. Le responsable m’a donc installée dans un petit coin. Pas de problème, j’ai sorti « Valium ». Quelques tours de manivelles plus tard, il revient me dire que finalement on m’aperçoit à travers l’ouverture du foyer central. Bon, d’accord, je peux continuer à lire ? Ça arrive quelqu’un qui lit en solitaire dans un resto, non ? Il pensait que oui mais n’en était pas certain ! En autant que je mange du pain tiens, pour que ça bouge à l’écran. Pourquoi pas, j’ai déjà mangé du pain en lisant.
Une fois la scène tournée de tous les bords et de tous les côtés, le troupeau figuration revient au bercail niché au deuxième étage. Là, ça m’impressionne toujours ces ententes tacites entre une vingtaine de figurants. Personne ne se consulte pourtant mais s’attablent ensemble ceux qui bavardent fort de politique, potins et autres (cette fois-ci, ils ont fait des mots croisés en collectif !) tandis que l’autre table sert de dortoir bibliothèque : quatre personnes contorsionnées, ou vautrées, dorment (il y en a même un qui a chanté en rêvant !) et les autres, moi, principalement, lisent.
Avant de partir pour dîner, j’apprends que malgré mon super équipement béni par la costumière, je ne ferai pas partie de l’extérieur « gare ». Je n’étais pas la seule, nous étions une poignée à nous en réjouir pour cause d'évitement de la flotte et du vent. Au retour, j’ai repris ma table quitte à relire certains paragraphes jusqu’à 3 fois (toujours Valium), cause proximité table bruyante, attendant toujours notre scène à tourner. Finalement, au retour de l’équipe « gare », on nous annonce que nous sommes tous « wrappé » (je ne sais pas si ce mot existe en anglais mais de toutes manières, depuis que je fais de la figuration, c’est mon préféré).
Vous voyez maintenant ce que je veux dire par l’illogisme de l’organisation ? On m’a fait tourner seulement des scènes pour lesquelles je n’étais pas adéquatement costumée et ensuite, on nous a envoyé dîner deux heures, à nos frais, puis fait attendre trois heures seulement pour nous faire entendre le mot « wrappé ». Un scénario courant, tellement courant que tous les figurants ont abandonné l’idée d’essayer de comprendre, un royal désabusement étant plutôt le lot commun.
Tous les figurants ont donc quitté laissant derrière eux six comédiens (Danielle Proulx, Guy Nadon, Maxime Denommée, Catherine Proulx-Lemay, Steve Laplante et une ?) à l’étroit dans des toilettes et un couloir puisque c’est là que se tournaient les scènes jusqu’à environ 20 heures. Ce qui faisait la joie d’au moins une personne, la propriétaire. Son resto serait une vedette belle et reconnaissable quand "Les aveux" ferait leur apparition sur nos écrans en février 2009.
Flûte ! Je réalise que c’est long résumer une journée de tournage !
13 commentaires:
Moi j'aime ça quand tu nous racontes des journées comme ça !
Merci ...
Je ne vois pas le plaisir à être figurant. Qu'est-ce que ça vous donne ?
@ Carine : Contente que ça te plaise.
@ Réjean : De l'argent. Han. Il en faut non ?
Je trouve que c'est très intéressant d'avoir ce point de vue, Venise. Ce n'est pas un job banal que tu as là!
En toute indiscrétion, chère Venise, est-ce que c'est payant ?
@ Réjean : Tout à fait confidentiellement ;-) ... ça vaut le déplacement. Surtout quand il y a du temps supplémentaire et il y en a presque toujours.
Ou sinon, le plus payant, c'est bien les figurations à la télévision car à ce moment-là, les conditions sont bien meilleures, genre 3 heures pour le prix de 8.
Ce qu'il faut savoir c'est qu'en tant que membre de l'Union des artistes, que l'on me fasse venir pour 2 heures ou 8, c'est le même prix, un forfait quoi ! À ce compte, un jour pour un commercial électoral (Radio-Canada), je me suis déplacée pour 1 heure et j'ai été payé 8, et grassement car la pub, c'est littéralement le jack-pot.
C'était dans la période où j'avais un agent. Actuellement, j'en ai pas, mes contrats sont des hasards de parcours, les réalisateurs me trouvant par ma fiche sur le site de l'UDA.
Il faudrait que je m'en occupe un peu plus. Je compte le faire, mais je veux pousser au niveau du théâtre qui m'interpelle beaucoup plus. Un vrai exutoire pour ma palette d'émotions !
Vous m'avez attrapé au bon moment, Réjean, quand je suis fatiguée (nuit de 3 heures), je suis très volubile ... Seulement quand je suis fatiguée, hein, on s'entend là-dessus !?
En ce qui me concerne j'aime beaucoup parcourir vos mots dame Venise car j'ai constaté depuis un bout que ceux-ci, peu importe le propos, sont tous fort intéressants.
Justement, je me demandais, vous n'avez jamais songé à écrire un bouquin?
Merci pour ces confidences. C'est très intéressant.
@ Suzanne : Mon 15 ans d'expérience en figuration m'y a déjà fait penser à ce bouquin. Je pense que la raison principale de ne pas l'avoir fait est la paresse. Bête comme ça. Un projet à moyen-long terme où il faut quand même une certaine rigueur dans le propos et de la discipline pour le mener. Et il faut l'ordonner, y trouver son angle.
Mais je n'ai pas encore mis une croix sur ce projet. Dans cette motivation de l'offrir sur Le Passe-Mot, il y a un peu de voir qu'est-ce que ça donne pour moi et pour vous. Il y a tellement à dire, mon sac est plein !
Comme hier, c'est vraiment un résumé. Il y a d'ailleurs un "détail" que j'ai le goût de rajouter ce matin.
Quoi qu'il en soit votre révélation sur l'intérêt de me lire me touche beaucoup. Beaucoup, beaucoup, même.
Pour être intéressant de venir lire ici: y a pas de soucis!
Peu importe le sujet, moi j'y trouve mon compte.
Et des résumés de journées de tournages, je trouve ça fascinant moi. Parce que c'est le genre de truc qu'on ne s'imagine pas trop quand on regarde un téléroman: tout est dans la boîte déjà pour nous!
Ouf! On ne peut pas imaginer à quel point ça prend du temps et de la patience pour tourner quelques minutes d'une scène!! Franchement, Venise, tu as de l'endurance!! Et je me dis que... coudonc, si tu as de l'endurance comme ça, tu devrais avoir le souffle assez long pour écrire un livre, quoique ça soit pas mal moins payant de l'heure, en général...
@ Laurence : En plus, avec ce que j'ai relaté là, je n'ai pas pu en rendre vraiment compte. C'est exorbitant la dépense de temps pour une minute de tournage. Une journée de tournage avec une centaine de personnes (équipe technique inclus), comme cette journée-là, c'est pour un 10 minutes de pellicule.
L'idée commence à faire son chemin pour le livre. Cela serait utile aussi car combien s'illusionne ... les jeunes surtout, bien entendu.
"Oui oui, je suis d'accord, c'est super intéressant", dit Maxime avec un léger retard. :P
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